Des télangiectasies profuses

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La Revue de médecine interne 32 (2011) 249–250

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Des télangiectasies profuses Profuse telangiectasia C. Rousseau a,∗ , H. Granier a , P. Schoenlaub b , J.-L. Grippari c , X. Protin a , X. Nicolas a a

Service de médecine interne, hôpital d’instruction des armées Clermont-Tonnerre, rue du Colonel-Fonferrier, 29240 Brest, France Service de dermatologie, hôpital d’instruction des armées Clermont-Tonnerre, 29240 Brest, France c Service d’anatomopathologie, hôpital d’instruction des armées Clermont-Tonnerre, 29240 Brest, France b

i n f o

a r t i c l e

Historique de l’article : Disponible sur Internet le 7 juillet 2010 Mots clés : Télangiectasies Panniculite Lymphome intravasculaire

Keywords: Telangiectasia Panniculitis Intravascular lymphoma

1. L’histoire Une femme de 85 ans était hospitalisée pour une altération de l’état général avec syndrome confusionnel. Dans ses antécédents, on notait une obésité morbide (IMC : 41 kg/m2 ), une hypertension artérielle traitée par inhibiteur de l’enzyme de conversion et béta-bloquant, un diabète de type 2 non insulinodépendant et une dyslipidémie. À l’examen, il existait un placard inflammatoire induré, sensible de la paroi abdominale, accompagné de télangiectasies profuses et arborescentes, apparu un mois auparavant (Fig. 1a,b). Il n’y avait pas d’adénopathie palpable ni d’hépatosplénomégalie. Biologiquement, il existait une anémie à 8 g/dl, normocytaire, arégénérative, une thrombopénie à 90 000 par millimètre cube, sans anomalie de la lignée blanche ni élément pathologique circulant, un syndrome biologique inflammatoire (CRP : 150 mg/l), une élévation des LDH à 9N, de la ferritinémie à 700 ␮g/l et des triglycérides à 4 g/l. Le bilan infectieux et immunologique était négatif. Le myélogramme ne révélait pas d’infiltration lymphoïde pathologique ni d’hémophagocytose. Le scanner abdominopelvien montrait une infiltration des tissus sous-

∗ Auteur correspondant. Adresse e-mail : [email protected] (C. Rousseau).

cutanés des deux flancs prédominant à gauche, sans syndrome tumoral. 2. Le diagnostic Un lymphome intravasculaire de phénotype B. 3. Les commentaires Une première biopsie cutanée montrait une panniculite dermo-hypodermique lobulaire avec macrophages s’insinuant dans le tissu adipeux hypodermique, sans cytophagocytose, sans prolifération suspecte de malignité. Une deuxième biopsie était réalisée une semaine plus tard, révélant une accumulation de cellules de morphotype lymphoïde de moyenne et grande taille, marquées par l’anticorps anti-CD20,comblant fréquemment la lumière des capillaires, faisant porter le diagnostic de lymphome intravasculaire de phénotype B. La patiente est décédée moins de trois mois après le début de la symptomatologie, alors que la polychimiothérapie n’avait pas encore été débutée. La possibilité d’un lymphome malin n’était pas exclue après la première biopsie cutanée. En effet, le caractère acquis et profus des télangiectasies, l’aspect infiltré de la paroi abdominale et les anomalies du

0248-8663/$ – see front matter © 2010 Société nationale française de médecine interne (SNFMI). Publié par Elsevier Masson SAS. Tous droits réservés. doi:10.1016/j.revmed.2010.05.002

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C. Rousseau et al. / La Revue de médecine interne 32 (2011) 249–250

âgé (médiane de 70 ans), sans distinction de sexe [1–3]. Il se caractérise par une prolifération de grandes cellules lymphoïdes dans la lumière des vaisseaux de petit et moyen calibre pouvant toucher tous les organes, à l’origine d’un grand polymorphisme clinique [3]. Cependant, les atteintes dermatologique et neurologique sont prédominantes [2,4]. L’atteinte cutanée se caractérise par des nodules sous-cutanés ou des plaques violacées infiltrées pouvant suggérer une panniculite. Ces lésions sont le plus souvent multiples, pouvant être asymptomatiques ou douloureuses, et sont fréquemment associées à des télangiectasies parfois diffuses et extensives, comme dans notre observation [1,2]. Ces lésions prédominent au niveau du tronc et de la racine des membres. Elles sont facilement accessibles à la biopsie permettant de faire le diagnostic histologique. Cependant, elles peuvent être initialement non contributives et il faut donc savoir les répéter. Elles mettent fréquemment en évidence une occlusion de la lumière des petits vaisseaux par les cellules tumorales [1]. Il existe des formes purement cutanées, sans diffusion systémique, se rencontrant plutôt chez les femmes plus jeunes (médiane à 59 ans), de meilleur pronostic [1]. Les manifestations neurologiques sont également fréquentes mais non spécifiques : déficit sensitivomoteur, démence, épilepsie [1,2]. L’atteinte du système cognitif est présente dans la moitié des cas [2]. Dans notre observation, il existait un syndrome confusionnel sans signe de localisation. Le scanner cérébral était normal. La ponction lombaire n’avait pas été réalisée. La pathogénie demeure mal connue. Des anomalies de l’adhésion des lymphocytes tumoraux à l’endothélium et de leur migration pourraient expliquer la localisation intravasculaire de ces lymphomes [1,3]. Le pronostic est mauvais avec 32 % de survie à trois ans, lié en partie au retard diagnostique [1]. Le traitement repose sur une polychimiothérapie type cyclophosphamide, doxorubicine, vincristine et prednisone (CHOP), associée au rituximab en première intention en cas de phénotype B [1,2]. Conflit d’intérêt Aucun. Références

Fig. 1. (a) Télangiectasies diffuses, profuses et arborescentes de la paroi abdominale, (b) lésions indurées et infiltrées en regard.

bilan biologique ont conduit à la réalisation d’une deuxième biopsie. Le lymphome intravasculaire est une variété rare de lymphome non hodgkinien de haut grade de malignité avec une incidence inférieure à un cas par million d’habitants, le plus souvent de phénotype B mature (90 %), touchant préférentiellement le sujet

[1] Vercambre-Darras S, Mortier L, Lambert M, Delattre C, Gaxotte V, Morell-Dubois S, et al. Thromboses veineuses récidivantes et télangiectasies arborescentes généralisées révélatrices d’un lymphome intravasculaire. Ann Dermatol Venereol 2008;135:397–401. [2] Pallure V, Dandurand M, Stoebner PE, Habib F, Colonna G, Meunier L. Lymphome B intravasculaire à type de lymphœdème inflammatoire fébrile des membres inférieurs et des lombes. Ann Dermatol Venerol 2008;135: 299–303. [3] Parisi E, Tortel MC, Chenard MP, Raby P, Mazurier I, Moskovtchenko P. Étiologie inhabituelle d’une pancytopénie : le lymphome intravasculaire. Ann Med Interne 2003;154:252–4. [4] Ozguroglu E, Buyulbabani N, Ozguroglu M, Baykal C. Generalized telangiectasia as the major manifestation of angiotropic (intravascular) lymphoma. Br J Dermatol 1997;137:422–5.

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