Andrzej Krzycki - Andreas Cricius - eveque des paradoxes

June 9, 2017 | Autor: J. Pietrzak-Thebault | Categoria: Renaissance Studies
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SEIZIÈME SIÈCLE 11 / 2015 p. 43-58

Joanna PIETRZAK-THÉBAULT / Université Cardinal Stefan Wyszy´nski, Varsovie

ANDRZEJ KRZYCKI – ANDREAS CRICIUS (1482-1537) : ÉVÊQUE DES PARADOXES

n 1603, dans l’index de Cracovie on trouve le nom d’Andrzej Krzycki, disparu alors depuis près de soixante-dix ans (il était mort en 1537), ancien évêque de Przemy l, P oc et même archevêque de Gniezno, ce qui équivalait alors, comme aujourd’hui, au titre de primat du pays. Son nom sera remis à l’index de 1604 et même à celui de 1617, l’Auctarium librorum haereticorum et prohibitorum 1617 editum publié par l’évêque de Cracovie, Samuel Szyszkowski. Parmi soixante-trois titres, dont seulement un tiers d’éditions étrangères, figurent en effet les Encomia Lutheris, publiés en 1524 1. Nous voici devant un premier paradoxe : l’un des premiers écrits anti-luthériens parus en Europe se retrouve à l’index à cause de son seul titre. En publiant les Encomia, recueil d’œuvres en vers, les siennes et celles d’autres auteurs, Krzycki était-il alors un pasteur soucieux, conscient du danger des nouveautés pour l’unité de la chrétienté ou plutôt, comme aiment le qualifier les historiens de la littérature, un « courtisan » ne songeant nullement à changer le train de vie et la position que sa place dans la hiérarchie ecclésiastique lui réservait ? Celui auquel il a emprunté l’idée du titre qui lui valut cette condamnation inopportune connaissait l’écrit. L’œuvre est en effet rapidement parvenue à Érasme après sa publication, comme le prouve une lettre de 1525 2. Sept lettres attestent d’une correspondance régulière, cinq ans durant, entre Cricius (nom latinisé utilisé à cette occasion) 3 et Érasme, qui, pour sa part, le considère Pour une description du contenu de l’index, voir Słownik literatury staropolskiej, éd. . ic a o s a, roc a -Varsovie- racovie, ssolineum, 2002 (1re éd. 1990), p. 139-140. Voir ibidem pour des études plus détaillées du sujet.  2 Voir J. Pelc, Europejskość i polskość literatury naszego renesansu, Varsovie, zytelni , 1984, p. 454. À propos des éditions romaines des Encomia Lutheri datant de 1524 et de 1527, voir aussi J. Fi a e , « rzyc i przeci utro i zymie. il a u ag z po odu yda rzyms ic ... , Pamiętnik Literacki, vol. 1, 1902, p. 421-433, et R. Nir, « Stanowisko biskupa Andrzeja Krzyckiego wobec luteranizmu », Studia Płockie, vol. 9, 1981, p. 73-85.  3 Parmi plus de trois mille lettres d’Érasme, nous comptons seulement quatre-vingt-douze polonicae ; soi ante-di de ses correspondants sont polonais ils apparaissent à partir de 1523 seulement. Voir Korespondencja Erazma z Rotterdamu z Polakami, trad. et éd. . yto s a, Varsovie, P , 1965, p. 9. Les lettres traduites dans ce volume sont repérables dans l’édition complète de la production épistolaire d’Érasme de P. S. Allen, H. M. Allen et H. W. Garrod, Opus epistolarum Des. Erasmi Roterodami, ord, 1906-1958. es lettres à rzyc i sont au nombre de sept, en cinq ans, entre 1525 et 1530, selon Allen 1629  1

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digne d’éloge par la bouche de Bulephorus, dans le dialogue du Ciceronianus 4. Les deux hommes s’appréciaient visiblement, selon les conventions de la lettre humaniste, et Cricius alla même jusqu’à proposer, sans succès, à Erasme une chaire, dont, d’ailleurs, il ne disposait pas, à l’Académie de Cracovie. Pour l’inciter à venir, il lui dépeint l’atmosphère intellectuelle de Cracovie et lui promet que là aussi il pourra trouver « des Froben . Pense-t-il au éditions de la célèbre maison de Bâle qui ne sauraient manquer au savant sur les rives de la Vistule, ou plut t au imprimeurs et éditeurs polonais capables alors, d’après lui, de rivaliser avec les meilleurs professionnels de l’époque 5 ? Les échanges épistolaires entre Krzycki et Érasme devront suffire comme exemple de ses contacts avec les hommes célèbres et les courants intellectuels majeurs de l’époque, car il n’est pas possible ici de parler de ses relations avec

(Korespondencja [...], p. 55-57), 1753 (p. 82-83), 1822 (p. 121-123), 2030 (p. 165-166), 2173 (p. 176-179), 2201 (p. 185-190), 2375 (p. 191-192). ne seule lettre de rzyc i est conservée, datant du 20 décembre 1525 (Allen 1652, p. 35-41), mais le contenu des lettres d’Érasme suggère que la correspondance fut menée dans les deu sens. a lettre d’ rasme au roi igismond er du 15 mai 1527 fut publiée par la maison de Wietor la même année et ut re ue en Pologne avec ent ousiasme. Voir ibidem (Korespondencja), p. 10 et 16-17. Voir aussi J. o « umanistyczna droga do Europy (na marginesie orespondenc i Erazma z Pola ami) , in Listowne Polaków rozmowy. List łacińskojęzyczny jako dokument polskiej kultury XVI i XVII wieku, éd. J. A er et J. a o s i, Varsovie, Fundac a Alet eia, 1992, p. 22-37, surtout p. 28-31, et J. oryl, « Erasmus Among is Polis orrespondents eligious dentity in t e Age o on essionalization , in Respublica Litteraria in Action. Religion and Politics, éd. A. olimo s a, Varsovie et racovie, B Artes iberales et PA , 2012, p. 143-175, surtout p. 147-148 et 173-174.  4 Erasmus de Rotterdamo, Dialogus cui titulus Ciceronianus, sive de optimo dicendi genere, per autorem et recognitus et avetus, Basileae, Froben, 1529, p. 174 (Bibliot que niversitaire de Varsovie, coll. d. 608. 16) « abet et armatia quos non possis contemnere, sed non commemorabo, nisi qui libellis in lucem datis, sui specimen dederunt. Horum princeps est Andreas Critius, Episcopus Plocensis, qui prorsus ingenium habet, ut ait ille, in numerato, carmina pangit feliciter, felicior etiam in oratione soluta, praesto est e tempore scribenti docta facilitas, sermo perpetua quadam orationis festivitate iucundus ». Érasme parle de rzyc i aussi à e ia en 1530, voir J. oryl, op. cit., p. 150, et J. Pelc, Literatura Renesansu w Polsce, Varsovie, emper, 1998 (2e éd. corrigée), p. 23. À propos du cicéronianisme dans la Pologne de la enaissance, voir B. t ino s a, « yceronianizm pols i , in Literatura staropolska i jej związki europejskie, éd. J. Pelc, roc a , ssolineum, 1973, p. 99-130, surtout p. 117-118.  5 Voir aussi . yto s a, « Andrze rzyc i. aproszenie do Pols i Erazma z otterdamu , Meander, 9e année, n 2, 1954, p. 95-98, et Acta Tomiciana, vol. 7, p. 345. Les Acta Tomiciana rassemblent des documents de la chancellerie royale, mais aussi d’autres documents et lettres précieux du xvie siècle. Les di - uit volumes, avec des inde , sont parus entre 1852 et 1999. es documents concernant rzyc i sont présents dans les volumes 1, 2, 7 et 15. Voir « Andreas ricius episcopus esiderio Erasmo otterdamo , in Carmina, éd. . ora s i, racovie, Academia itterarum racoviensis, 1888, p. 256-257, et A. Jobert, De Luther à Mohila. La Pologne dans la crise de la Chrétienté 1517-1648, Paris, nstitut d’études slaves, 1974, p. 43-60, surtout p. 49. La ville royale eut, en effet, le temps de devenir un centre éditorial important au plan local, même si seulement quatre maisons d’édition y travaillaient alors. Voir Drukarze dawnej Polski od XV do XVIII wieku, éd. A. Kawecka-Gryczowa, vol. 1 Małopolska, roc a -Varsovie, ssolineum, 1983, p. 44-62, 231-264, 299-313 et 325-352. « es Froben de racovie seraient sans doute Jan aller, Florian ngler, ieronim ietor et la amille c ar enberg. a production polonaise des années 1501-1530 se limitait à 127 titres. Voir Zarys historii Polski w liczbach. Społeczeństwo. Gospodarka, éd. F. Kubiczek, Varsovie, a ad yda nict tatystycznyc , 2012, p. 253 ; cf. E. Buszewicz, Cracovia in litteris. Obraz Krakowa w piśmiennictwie doby Odrodzenia, racovie, niversitas, 1998, p. 143. a ville ut aussi louée dans des poèmes composés à l’occasion de deux mariages royaux, non seulement pour sa vie luxueuse mais aussi comme une « Nouvelle Athènes », voir E. Buszewicz, op. cit., p. 91, 186, 212, et J. oryl, op. cit., p. 149-158.

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Crisostomo Colonna, Celio Calcagnini, Leonard Coxe ou encore Melanchthon 6. Non moins important est le fait que cet ancien étudiant de l’université de Bologne, élève d’Antonio Urceo dit Codro 7, connaissait très bien la littérature classique, y compris les auteurs archaïques comme Plaute et Térence 8. l serait aussi difficile de décrire son activité littéraire ou diplomatique de manière exhaustive, et il vaut mieux procéder par petites touches, pour extraire ce qui démontre le mieux le caractère paradoxal du personnage et de son œuvre. Pourtant, les recherches menées jusqu’ici ont toujours tenu à mettre en lumière sa biographie : soit dans un objectif panégyrique soit, plus souvent, pour le juger de manière sévère. Ces travaux vont nous accompagner tout au long de notre investigation car ils restent encore indispensables pour saisir les paradoxes de sa biographie, de son œuvre littéraire et de sa fortune éditoriale. Ces trois plans s’entrecoupent sans cesse, et la stricte chronologie ne nous permettrait pas de faire ressurgir la problématique dont la présentation ne peut être ici, nous en sommes consciente, exhaustive. Les historiens de la littérature considéraient Krzycki comme un auteur habile certes, mais ayant inutilement prêté la plume à des sujets trop volages, à de l’actualité trop fugace, se pliant pleinement à des conventions de la poésie de cour d’une part, et n’obéissant pas de l’autre aux règles d’un classicisme formel tellement prisé 9. é en 1482 10, d’une famille noble mais appauvrie, le futur évêque avait sa carri re « dans le sang . on demi- r re, i o a , était c anoine à racovie,  6 Voir la lettre de P ilippe elanc t on à rzyc i, du 27 octobre 1532, in Materiały do dziejów piśmiennictwa polskiego, éd. . ierzbo s i, vol. 1, Varsovie, s. n. , 1900, p. 41-42 (édition moderne Varsovie, yd. Artystyczne i Filmo e, 1978) ; voir aussi E. Busze icz, op. cit., p. 147 et J. Gruc a a, « Zmarnowany talent – Andrzej Krzycki », in Pisarze staropolscy. Sylwetki, Varsovie, iedza Po szec na, 1991, vol. 1, p. 256.  7 J. Gruc a a, art. cit., p. 259. ur les universités italiennes et la place de la culture italienne en Pologne à l’époque, voir J. oma s i, « a ricezione dell’umanesimo italiano nell’ambiente universitario cracoviano (prima dell’arrivo di Filippo allimaco) , in La tradizione italiana nella vita intellettuale ed artistica in Europa centrale e orientale, éd. P. al a et . Facca, Varsovie, emper, 2008, p. 7-16, et . zczuc i, « L’Umanesimo italiano e la cultura polacca », ibidem, p. 17-28.  8 Metryka grecka i łacińska, éd. . us a et . trzelec i, roc a , ssolineum, 1959, p. 201.  9 Voir . ora s i, Czasy zygmuntowskie na tle prądów Odrodzenia, Varsovie, P , 1965 (les études datent cependant de la fin du xixe et du début du xxe si cle), p. 9 (pré ace de J. azbir), 45, 47-48 et 84-85. Le portrait de Krzycki, qui y est présenté comme « cymbalum mundi », reste toujours très intéressant. La légende noire de Krzycki (celle d’un homme au caractère exécrable et à la langue mordante, celle d’un intrigant et d’un luxurieux) se heurte ici à une autre légende, tout aussi noire et plus tenace encore, celle de la reine Bona Sforza : voir W. Pociecha, Królowa Bona, vol. - V, Pozna , Pozna s ie o arzyst o Przy aci au , 1949-1958 ; . Bac vis, « a poésie latine en Pologne pendant la premi re p ase de l’ umanisme , Helicon. Acta Comparationis Litterarum Universarum, vol. 1-2, Budapest, A adémiai iad outon, 1975, p. 57-59, 62, 65, où nous pouvons lire, entre autres, ceci : « Krzycki appartenait à ce type d’écrivains qui, tout en lançant des poignées de boue à toute volée, ont l’air – littérairement tout au moins – de garder les mains propres » (p. 65) ; idem, « Un poète latin de la Pologne humaniste André Krzycki – Andreas Cricius (1482-1537) , Latomus, vol. 6, fasc. 1, janvier-mars 1947, p. 31-44. Sur la difficulté d’interprétation de son uvre, persistante dans la critique polonaise, voir . Goleni ev- outouzov, Odrodzenie włoskie i literatury słowiańskie wieku XV i XVI, Varsovie, P , 1970, p. 313-315 et 325-326.  10 La date de naissance de Krzycki fut un certain temps controversée : voir A. Syruczek, « Ustalenie daty urodzin Andrzeja Krzyckiego », Pamiętnik Literacki, 9e année, 1912, p. 289-298.

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ort apprécié par le cardinal Frédéric Jagellon, r re du roi, quand Andrze y commença ses études, et un frère de sa mère, Piotr Tomicki, était alors déjà évêque et allait devenir l’un des personnages les plus importants du pays 11. C’est lui qui envoya son neveu à l’université de Bologne et qui, à son retour en 1504, l’introduisit dans les milieux ecclésiastiques de la Grande Pologne. Le nouveau roi Sigismond, controversé dans l’ouest du pays, avait besoin du soutien de la hiérarchie locale. En tant que jeune secrétaire de l’évêque de Pozna , Jan ubra s i umaniste, méc ne, éc angeant des lettres avec Alde Manuce – Krzycki aura maintes occasions de connaître de près le diocèse et les affaires d’État et d’Église, en y prenant une part de plus en plus décisive 12. ans sa carri re ecclésiale, il suivra les pas de omic i les mêmes études, les mêmes charges dans les chancelleries, ambassades, bénéfices, la charge du même diocèse. Après un premier poste épiscopal au pied des Carpates, à Przemy l, en partie à reconstruire apr s une récente incursion des artares en 1522, la promotion l’attend en 1527 à P oc , dans le centre du pays. ans le même temps, il séjourne davantage à la cour du roi et s’occupe des affaires de l’État – le grade d’évêque ne lui donnait-il pas aussi celui de sénateur ? – et ses capacités de négociateur, de chancelier, et d’auteur d’oraisons n’incitaient pas la cour à se passer de ses services. l s’attendait pourtant à suivre les pas de omic i, comme il l’avait ait à Przemy l, et croyait au si ge de Pozna , dioc se ric e et prestigieu qu’il connaissait bien, vacant en 1525. e sacre à P oc , plus l’arc evêc é de Gniezno en 1535 l’ont sans doute consolé. l prend ce dernier le jour de la mort de Piotr Tomicki, parent toujours aimé et estimé. Présage funeste, car Krzycki lui-même meurt deux ans plus tard, le 10 mai 1537. Après sa mort, le testament du primat, expression toute particulière non seulement de sa volonté de mécène, attentif à tous ses diocèses, mais aussi d’un sens humain de la protection de sa famille et même de ses domestiques, provoquera l’opposition de son successeur. Le testament ne pourra être exécuté que grâce à l’intervention directe du roi. Cette « affaire du testament de Krzycki » – bien connue à l’époque et présente dans l’historiographie – peut paraître tout de même paradoxale pour quelqu’un qu’on voulait souvent présenter comme un personnage dépourvu de toute parcelle de bonté, de justice, de charité ou de clémence 13. Compte tenu de sa biographie, les chercheurs, à partir du milieu du e xix siècle, se sont inlassablement posé une question : Krzycki était-il un courtisan ou un évêque ous répondons courtisan parce qu’évêque. es évêques qu’il connaissait et réquentait ubra s i, omic i, antysze

 11 Voir A. drzy ols a- ida a, Podkanclerzy Piotr Tomicki (1515-1535), polityk i humanista, Varsovie, Semper, 2005.  12 Voir J. Pelc, Europejskość [...], op. cit., p. 103-105.  13 t. Brzezi s i, Proces o testament prymasa Andrzeja Krzyckiego, in Księga ku czci Oskara Haleckiego, Varsovie, a . Jego uczni , 1935, p. 275-289 ; Materiały […], op. cit., vol. 1, p. 62-63.

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( antiscus) ou as i avaient leurs propres cours et rzyc i en aisait autant, surtout à Pu tus  14, au temps de son service épiscopal à P oc  15. L’importance du phénomène des cours épiscopales en Pologne est attestée par la paraphrase du Livre du courtisan de Baldassare Castiglione. Le courtisan polonais Dworzanin polski de u asz G rnic i, publié en 1564, est trans éré à la cour de amuel acie o s i à Pr dni , pr s de racovie. ’était donc la cour d’un évêque qui était jugée l’institution la plus appropriée pour transmettre aux lecteurs polonais le modèle moderne des vertus individuelles, sociales, patriotiques enfin 16. Que le seul échec que rencontre dans sa carrière Krzycki nous serve à montrer les méandres de cette double appartenance et à dévoiler un peu la manière dont il agissait. La déception dut être vraiment grande, car elle résonne de multiples manières et peut servir de point décisif pour l’interprétation de la figure même de Krzycki tant elle soulève un nœud de questions biographiques et poétiques sur la fortune et l’accueil de son œuvre dans les siècles à venir. L’échec de son ambition d’obtenir le prestigieux dioc se de Pozna ut d’autant plus di icile à supporter qu’il advint à cause de l’opposition de la reine Bona, dont il était secrétaire et qui, en femme au caractère et à la personnalité politique bien trempés, semblait apprécier Krzycki à sa juste mesure 17. Les vers malicieux qu’il composa et fit circuler alors à l’encontre d’un contre-candidat, Jan atals i, vainqueur et à ce moment précis favori de la reine, mais connu pour son penchant pour la boisson et sa vie dissolue, lui valurent d’être considéré comme un adversaire à la langue particulièrement affûtée : e meretricula demissa in reti per enestram e ospitio cuiusdam episcopi, ianua per hospitem occlusa Praesulis ex alta Thais demissa fenestra Quod fuit in reti nec patuere fores, Nescio cur factum culpatur, maxime nunc cum

 14 Pas de cour sans mécénat, Krzycki rénove le château et dote la ville de murs, mais fait aussi installer une imprimerie, plut t ép ém re, dans les années 1532 ou 1533 par Jan andec i- alec i, personnage éminent de la philologie biblique du siècle. Sur Sandecki-Malecki, voir Drukarze dawnej polski […], op. cit., p. 187-190, et Drukarze dawnej polski. Mazowsze z Podlasiem, éd. . orota e o a et J. rauzearpi s a, vol. 3, 2e partie, Varsovie, yd. B PA , 2001, p. 333.  15 l aut rappeler ici la construction à la enaissance de la cat édrale de P oc . Voir . . un el, « enesanso a atedra p oc a i e t rca Bernardinus de Gianotis , Biuletyn historii sztuki, 49e année, n 3-4, 1987, p. 227-247.  16 Bien que G rnic i appartienne dé à à la p ase suivante de la enaissance polonaise, certaines caractéristiques de la ormation culturelle précédente restent inc angées. Voir . o t o s a- a symi , « Gentiluomo cortigiano » i « Dworzanin polski ». Dyskusja o doskonałości człowieka, Varsovie, B PA , 2007 ; . ygiels i, « Przet umaczy , spolszczy czy spara razo a orzanin pols i u asza G rnic iego oczac istory a , in Łukasz Górnicki i jego włoskie inspiracje, éd. P. al a, Varsovie, Semper, 2005 ; et A. Gallewicz, « Dworzanin polski » i jego włoski pierwowzór. Studium adaptacji, Varsovie, emper, 2006.  17 propos des traits émotionnels et e travertis de sa poésie, voir A. arpi s i, Renesans, Varsovie, Wyd. Naukowe PWN, 2007, p. 31-36.

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Natum evangelium cerdo faberque crepat; Nam piscari homines quod sit res praesule digna, Iuxta evangelium nemo negare potest.

d actum erat Gedani (1526) rege de praetorio prima luce spectante, in ospitio oannis atals i, episcopi Posn 18. La reine Bona, qui avait alors le privilège de nommer les évêques, d’où le dicton qu’en Pologne un évêque n’arrivait pas « in nomine omini mais bien « in nomine ominae , était la vraie responsable de cet éc ec. Elle n’a pas été épargnée, et l’attaque, bien que moins directe, a été parfaitement compréhensible car le blason – nous reviendrons sur la sensibilité aux blasons – de sa famille d’origine, celle des Sforza (de Bari), était connu de tous, ainsi que la légende du dragon : Si sub rupe draco conclusus hiante caverna Urbis Cracce tuae magna vorago fuit, Quid mirum, quod in arce sedens rerumque potitus Solus inexpleto viscere cuncta voret 19 ?

Et encore : Quando sub arce fuit, Cracovia sola peribat, cum sit in arce draco, patria tota perit 20.

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Krzycki se réconcilia rapidement avec la reine et continua d’écrire des poèmes plus cléments – comme celui qui décrit un lièvre mort pendant la chasse parce qu’il s’arrête dans sa fuite pour contempler la beauté de la reine qui le poursuit – mais il ne pardonna jamais à Latalski et continua de diffuser l’image d’un évêque amateur de boissons, puni de manière originale quand il fut frappé par les reliques d’un saint, tombées du reliquaire durant la messe car offusquées de voir un ministre officier le ventre rempli de bière 21 ! Reprocher de tels travers peut étonner quelque peu de la part de quelqu’un qui appartenait  18 Carmina, op. cit., p. 162-163. « Sur une catin descendue dans un filet par la fenêtre d’un logement d’un évêque car la porte avait été fermée par le propriétaire. ’une aute enêtre d’un évêque, a s a été descendue dans un ilet car la porte n’était pas grande ouverte et je ne sais pas pourquoi on l’accuse pour ce qu’il avait fait, surtout de nos jours quand artisans et ouvriers proclament l’évangile. Car personne ne peut nier que pêcher des hommes est une chose digne d’un évêque et con orme à l’évangile. e ait est advenu à Gda s (en l’année 1526), dans le logement de Jan atals i, évêque de Pozna , quand le roi, t t le matin, regardait par la enêtre de la mairie. Je remercie zabela ience du Fonds Ancien de la Bibliot que niversitaire de Varsovie d’avoir voulu si patiemment vérifier mes traductions des textes latins.  19 Carmina, op. cit., p. 87. a légende du dragon était à l’époque bien vivante à racovie, voir E. Buszewicz, op. cit., p. 57. « Si déjà, quand il logeait au pied du rocher, dans sa caverne béante, le dragon fit maints ravages dans ta ville, Craccus, quoi d’étonnant qu’aujourd’hui, où il loge sur l’Acropole et gouverne en maître absolu, il dévore tout sans pouvoir assouvir son insatiable appétit ? » Trad. d’après Musae Reduces. Anthologie de la poésie latine de la Renaissance, textes choisis, présentés et traduits par P.Pl. et . Balavoine, eyde, Brill, 1975, vol. , p. 43.  20 Carmina, op. cit., p. 86. « uand il logeait au pied de l’Acropole, seule racovie périssait, maintenant qu’il loge sur l’Acropole, c’est la patrie tout entière qui périt. » Trad. d’après ibidem.  21 Voir Carmina, op. cit., p. 161-162.

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à la cour à la société des « Bibones et comedones » et à qui on doit, entre autres, une louange de la bière en réponse à celle du vin : Nostrum potum semper laetum, Quando placet, citra metum Ad iucundum usque fletum Hauris grandi poculo. [...] Salve felix creatura, Salve caelestis mixtura, Non natura, sed coctura Tritici cum humulo 22.

Les activités de cette Société offraient également de nombreuses occasions pour composer des vers que les éditeurs appelleront plus tard carmina amatoria 23. e nombreu po mes, tr s souvent en orme d’épitap es parodiques, sont des priapées parmi les plus osées de toute la littérature polonaise. Krzycki n’a jamais nié en être l’auteur, même si certains contemporains ont essayé de les attribuer à ses compagnons de table ou d’affaires de Cupidon. Une poésie apparemment innocente, composée à l’occasion du mariage de Beata o cielec a, demoiselle de la cour et ille d’une ancienne ma tresse du roi Sigismond, avait ainsi un double sens : O Beata, decorata rara forma, moribus, o honesta ac modesta vultu, verbis, gestibus ! Digni simul et indigni te semper suspiciunt et grandaevi ac prudentem propter te desipiunt

Carmina, op. cit., p. 263. « Notre boisson rend toujours gai, n’aie pas peur, bois quand l’envie te prend, usqu’à ton suprême plaisir puise à ce grand calice. ... ois la bienvenue, invention bénie, sois la bienvenue, mi ture céleste advenue non de a on naturelle mais gr ce au brassage du blé et du oublon. Voir . Ganszyniec, « Ec a pie ni goliardo e Polsce , Przegląd Humanistyczny, 5e année, 1930, p. 174-175. Je ne cite ici qu’un ragment de l’ uvre qui est aussi attribuée à antiscus. Nous parvenons à connaître le personnage de Krzycki à travers la correspondance d’autres personnages, voir celle de « l’ omme de antzig récemment numérisée ttp dantiscus.ibi.u .edu.pl letter ummary letter 6251 lang pl lang eng lang pl ; pour rzyc i, voir http://dantiscus.ibi.uw.edu. pl/?f=personDetails&person=75. Seize lettres des deux hommes sont actuellement accessibles sur le site. ur antiscus, voir . o a , Jan Dantyszek: portret renesansowego humanisty, roc a , ssolineum, 1982, p. 76-87 et 210-285. Voir aussi J. Gruc a a, art. cit., p. 264-268. ur les di icultés d’établir le Corpus Cricianus, voir infra.  23 K. Morawski ajoute tout de même dans la note « debebamus addere : et obscena », op. cit., p. 197 ; voir aussi C. Backvis, Szkice o kulturze staropolskiej, Varsovie, P , 1975, p. 61-62.  22

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[...] Ergo nacta dona tanta divina clementia, quod ceteris longe praestas, haec devita vitia; Ne superbam et ingratam te monstres amantibus, sed comem et redamantem te semper laudantibus 24.

Qui savait écrire des parodies d’épitaphes, savait aussi se servir des hymnes traditionnelles de l’Église pour vanter les grâces de la Beata bénie qui, même si elle était devenue dame, devrait, selon Krzycki, toujours regarder ses serviteurs du même œil bienveillant. La présence de rythmes d’origine médiévale, utilisés par Krzycki à d’autres occasions 25, tant dans sa poésie religieuse (voir infra) que « mondaine », est s rement le ruit d’un c oi délibéré. ans d’autres compositions il sait pourtant se plier aux exigences de la versification classique pour composer des distiques élégiaques parfaits, même s’ils manquent parfois de régularité. Est-ce le symptôme d’un défaut d’attention, de hâte, ou encore un signe de recherche formelle 26 ? Ces tentatives seraient-elles des intuitions, témoins de courants sous-jacents qui allaient signer plus tard le développement de cette littérature ? Sous la plume de Cricius, beaucoup d’innovations se rencontrent en effet pour la première fois. C’est la première fois dans l’histoire que descendent sur terre polonaise les dieux, les déesses et les nymphes, lorsque dans l’epithalamium écrit pour le deuxième mariage du roi, avec Bona Sforza, en 1518, ils viennent persuader le monarque qu’ils ont trouvé pour lui une épouse parfaite et changent en même temps, ne serait-ce qu’un bref instant, le climat des terres où règnent les Boréades : Interea florum suavi perfundor odore Et Zephyro qualis spirat per gramina Tempe Et nemus Aonium perque alta cacumina Pindi.

Carmina, op. cit., p. 88. « , Béatrice, dotée de ormes et de m urs e ceptionnelles, onnête et pudique de visage, de paroles et de gestes ! Tes prétendants, qu’ils soient dignes ou indignes de toi, t’admirent tou ours. ... onc si tu as re u de si grands dons de la clémence divine, car tu surpasses de loin les autres, évite leurs erreurs : ne te montre pas fière et ingrate envers tes amants mais sois leur compagne et réponds à leurs amours, à ceu qui tou ours te louent . Voir aussi . Ganszyniec, « Ec a , art. cit., p. 168-169.  25 Cette manière d’agir, pleinement consciente, est attestée dans le recueil de K. Morawski, op. cit., par le recours, à cinq reprises au moins, à la forme d’une « cantilena » pour traiter de sujets religieux et politiques. Voir J. Gruc a a, art. cit., p. 275-276.  26 Voir . Ganszyniec, art. cit., et Metryka grecka […], op. cit., p. 201-203.  24

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Obstupui subito mutatoque ordine rerum Ver puto, cum bifrons pandit vaga cornua Ianus 27.

C’est aussi la première fois, dans un vers rythmé que Krzycki lui-même appelle « prose » ou en prose véritable, que dialoguent des personnages allégoriques : Religio et Respublica dans le premier cas, Respublica, Nemo et Omnia dans le second 28. C’est aussi la première fois que sera imprimée une œuvre entière sur une bataille contre les Turcs, l’Experientis ad Innocentium octavum pontificem maximum [...], de bello inferendo Turcis oratio. Cette lettre de Philippus Callimachus Experiens alias Fillippo Buanoaccorsi, « dépoussiérée » et rendue publique en 1524, attira plus tard l’attention de Stanislas Hosius, cardinal et Père du concile de Trente, mieux connu pour ses écrits polémiques anti-réformateurs que pour ses poésies 29. Les écrits au sujet des guerres turques iront se multipliant dans les décennies à venir, quand le danger se fera sentir comme plus réel, acquérant même une dénomination propre, les « turcyki ». Krzycki est également considéré comme l’inventeur d’une nouvelle forme poétique, initiée par les vers « pour le blason de l’évêque Jan ubra s i, publiés en 1513 30. Ces stemmata, une forme spécifique et locale d’emblemata, compositions à la louange des blasons des familles nobles, allaient devenir en Pologne une forme d’expression très populaire, puisant dans la longue tradition d’associer le blason avec le « cri de guerre » de la famille. Seul Krzycki osa pourtant employer cette forme encomiastique pour composer des vers satiriques a in de dénigrer ses adversaires rzyszto zyd o iec i, Jan atals i

 27 Carmina, op. cit., p. 63. « Je suis envo té d’un dou par um de leurs et du ép yr qui sou le au-dessus des herbes de Tempé, à travers le bosquet d’Aonie et les hautes cimes du Pinde. Tout à coup, je suis resté pétri ié, l’ordre des c oses a été c angé, e pense que c’est le printemps alors que Janus au deu visages promène ses cornes errantes » (d’après les commentateurs il s’agirait des cornes du Taureau, signe astrologique du début du printemps). Voir J. Gruc a a, art. cit., p. 278-281.  28 Religionis et Reipublicae quaerimonia, 1522, puis 1606 : c’est le seul ouvrage de Cricius à être publié pour la deuxième fois avant le xixe siécle ; In vulgatum nuper quandam asianam diaetem Diogenis Dalmatae dialogus, s.l., 1536, puis Carmina, op. cit., 1888. Voir J. o a - u e s i, Okolicznościowa poezja polityczna w Polsce. Czasy Zygmuntowskie, Varsovie, PA , 1966, p. 129-132.  29 Philippi Callimachi Experientis ad Innocentium octavum pontificem maximum, Iena ortum, de bello inferendo Turcis oratio, racovie, J. aller, 1524. ans In laudem Philippi Callimachi experientis per celeberrimum antistitem praemisliensem dominum Andream Critium ab interitu vindicati Stanislai Hosii Cracoviani epigramma, le cardinal Hosius apelle Krzycki « musarum dulcis alumnus, Sarmatici ritius , cité d’apr s tanis a oz usz, Poezje, éd. . dyniec, trad. A. amie s a, lsztyn, Po ezierze, 1988, p. 6-7. Voir aussi J. tarna s i, « ult iel ic m m odzie czyc poez ac aci s ic tanis a a oz usza , in Kardynał Stanisław Hozjusz (1504-1579). Osoba, myśl, dzieło, czasy, znaczenie, éd. t. Ac remczy , J. Guzo s i et J. Jeziers i, lsztyn, rode Bada au o yc im. o ciec a trzy s iego, 2005, p. 238-239 ; J. Pelc, Europejskość [...], op. cit., p. 92. Sur l’activité des autres poètes contemporains, et surtout de i o a usso czy et de antiscus, ibidem, p. 109-111 ; voir aussi J. Pelc, Literatura [...], op. cit., p. 55.  30 Viaticum Posnaniense summa laborum elucubratione novissime impresum cum quibusdam addicamentis pernecessariis hincinde decoratum, racovie, Jan aller, 1513.

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(tou ours), Jan arn o s i, la reine elle-même 31. Encore une fois, un emploi novateur et une pratique traditionnelle se rencontrent pour un résultat heureux et durable. Si les œuvres poétiques de Krzycki prennent si souvent pour thème l’actualité politique, c’est que leur auteur était un diplomate chevronné. Énumérer les affaires étrangères et domestiques auxquelles il participa suffit pour comprendre combien il était estimé à la cour. Krzycki gérait, par exemple, le dossier des relations tumultueuses avec la Hongrie, surveillait les négociations avec l’ rdre eutonique concernant sa sécularisation et suivait l’incorporation définitive de la Mazovie au royaume ainsi que l’extinction de la rébellion des bourgeois de Gda s . l préparait également l’élection du eune, et utur roi, igismond , et dé endit le pouvoir royal apr s la di te de Piotr en 1535 32. En partisan d’un pouvoir royal fort, il allait donc à l’encontre des premières tendances intérieures qui s’y opposaient et allaient finalement l’emporter. Enfin, comment ne pas évoquer ici sa participation discrète aux négociations quelque peu obscures de 1519 avec les ambassadeurs de Fran ois er ? Sous le sujet des mariages royaux se cachait en effet le projet d’un changement politique. Mais un heureux choix était-il possible entre un allié de la lignée des Habsbourg, quelque peu embarrassant, certes, par sa force constamment croissante, mais qui était un voisin incontournable, et un nouvel allié français, lointain, inconnu, et qui promettait peut-être trop à la légère 33 ? Compte tenu des circonstances, il est compréhensible que la poésie dite « de cour » de l’évêque-courtisan constitue le véritable centre de son écriture. Lorsqu’il organise des concours poétiques de circonstance – ceux pour le mariage du roi avec Barbara Zapolya en 1512 et, six ans plus tard, avec la princesse italienne Bona Sforza – ces tournois réunissent les meilleures plumes et constituent des occasions non seulement de vérifier l’état de la technique poétique du moment, mais aussi de susciter une rivalité et de donner parfois comme résultats des œuvres novatrices et méritant d’être aussitôt imprimées 34.

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Fr. Pilarczy , Stemmata w drukach polskich XVI wieku, ielona G ra, y sza z o a Pedagogiczna, 1982, p. 24-29, 173, 196.  32 Polski Słownik Biograficzny, éd. . onopczy s i et al., vol. 15, roc a , ssolineum, 1992, p. 544-459 ( t. ab oc i). Cf. A. ycza s i, Między kulturą a polityką. Sekretarze królewscy Zygmunta Starego (1506-1548), Varsovie, P , 1990.  33 L’attestent deux lettres concernant l’impatience des ambassadeurs français, Acta Tomiciana, vol. V, n 46 et 47. A. ycza s i, Francja wobec państw Jagiellońskich w latach 1515-1529, roc a , ssolineum, 1954, p. 50-57. Polski Słownik Biograficzny donne la date de 1523.  34 Voir les opinions discordantes J. Pelc, Europejskość [...], op. cit., p. 100 ; . Bro e , « Epitalamia Zygmuntowskie », in Łacińska poezja w dawnej Polsce, éd. . ic a o s a, Varsovie, B PA , 1995, p. 43-54 ; J. o a - u e s i, op. cit., p. 69-73 et 78-85 ; . Bergmann, « Pols o- aci s e epitalamium , Pamiętnik Literacki, vol. 25, 1928, p. 188 et suiv. ; . ta ec a, « Elementy liryczne i epiczne pols oaci s im epitalamium , Roczniki Humanistyczne KUL, vol. 14, n 3, 1966, p. 8 et suiv. ; . ab oc i, Polsko-łacińskie epicedium renesansowe na tle europejskim, roc a -Varsovie- racovie, ssolineum, 1968, p. 147 ; . yto s a, « o e u agi o umanistycznym eptalamium , Meander, 15e année, n° 10, 1960, p. 535-547, surtout p. 543-545. Sur les sources possibles des poètes polonais et le contexte littéraire de l’époque, voir . Bro e , op. cit., p. 39-43, et J. o a - u e s i, op. cit., p. 138-148.

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ans la poésie amoureuse, accusée d’être conventionnelle, la présence de mod les de la littérature umaniste, qu’il avait connue en talie, crée un substrat riche et multiple ; Krzycki fut l’un des premiers à introduire dans sa poésie des motifs empruntés à Horace 35. ans la mémoire des Polonais, il en reste peut-être un seul motif – celui de la coexistence du feu et de la glace, attribué à Pétrone (« Ad Juliam ), repris par le contemporain Jo annes ecundus Hagiensis, qui paraît retravaillé sous la plume de Krzycki avant de devenir un des motifs préférés de la poésie érotique de l’âge baroque en Pologne : Me nive cadenti petiit modo Lydia ; rebar Igne carere nivem, nix tamen ignis erat. Quid nive frigidius ? nostrum tamen urere pectus Haec potuit, manibus missa puella tuis. Quis locus insidiis dabitur mihi tutus amoris, Frigore concreta si latet ignis aqua ? Lydia sola potes nostras extinguere flammas, Non nive, non glacie, sed potes igne pari 36.

L’œuvre religieuse de Krzycki est plutôt modeste : en témoigne à peine une trentaine de poésies, recueillies et publiées par l’auteur lui-même en 1535, lorsqu’il devient évêque de Gniezno 37. l y ait preuve de la même attention portée à la recherche formelle (une forme de cantilène, type de vers mentionné dans le titre, revient à plusieurs reprises, par exemple). Certains poèmes échappent à la doctrine abstraite, lorsqu’il les intitule Sub imagine Christi crucifixi in templo s. Catherinae Cracoviea ou encore In templo s. Annae Cracoviae. ans d’autres po mes nous voyons aussi un pasteur attentif, qui tient à donner des conseils à ses prêtres, conseils demeurant toujours actuels :

 35 A. arpi s i, op. cit., p. 117. Pour la continuité des motifs classiques dans la poésie érotique polonaise et sur le nombre des propositions de Krzycki qui demeurent actuelles, voir ibidem, p. 208. Voir J. Gruc a a, art. cit., p. 262-264.  36 Carmina, op. cit., p. 210-211. « idia m’a rappé à l’instant d’une boule de neige. Je croyais qu’il n’y avait pas de feu dans la neige, et pourtant la neige était le feu même. Qu’est-ce qu’il y a de plus froid que la neige ? Et pourtant cette neige, partie, ô fille, de tes mains, savait allumer mon cœur. Quel abri pourrais- e trouver pour uir le pi ge de l’amour si le eu se cac e dans l’eau gelée par le roid idia, toi seule peux éteindre ma flamme, non point par la neige ni par la glace mais par un semblable feu ». G. Urban-Godziek, Elegia renesansowa. Przemiany gatunku w Polsce i w Europie, Cracovie, Universitas, 2005, p. 142-143 et 160-164. La dernière édition de Pétrone, Satyricon reliquiae, éd. K. Mueller, Stuttgarteipzig, n dibus B. G. eubneri, 1995, ne retient pas le po me « Ad Juliam » parmi les œuvres de l’écrivain. À propos du motif, voir aussi M.-A. Muret, The Iuvenilia, éd. . . ummers, olumbus, io State University Press, 2006, p. 50 (1re éd. à Paris, 1579). Voir aussi Helikon polski. Wątki i tematy polskiej poezji barokowej, éd. A. Vincenz et . alic i, roc a , ssolineum, 1989, p. et Carmina, op. cit., p. 210-211.  37 Cantica sacra carmine sapphico, Cracovia, apud Unglerum, 1535. Comme le dit l’éditeur, K. Morawski, op. cit., 1888, p. 8 « electorum carminum uius generis ipse ricius editionem curasse dicitur cui inscriptum erat antica ... . eu de ces vingt-si poésies avaient dé à été publiées en 1527.

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Non tantum labiis, sed tota mente, sacerdos, Orandum est, validas si cupis esse preces. Spiritus est vocemque Deus non audiet oris Ex animi vera ni pietate fluat 38.

C’est aussi un poème religieux qui semble être le seul texte polonais qui a coulé de sa plume. ieronim Juszy s i cite un quatrain qui incite à la lecture d’une œuvre pieuse d’Aurelius Lippus : Chceszli po śmierci w nyebie z Anioły mieszkawać, Trzebać pylnie tę thu spisaną rzecz czytawać. A bądź iako chcesz zakamiałym, wierz mi, puścisz, Y tak sę z niecnoth w cnoty Chrysta Pana przekrzcisz 39.

C’est pourtant à la cour royale que Cricius a laissé une trace très évidente de son séjour, plus durable encore que les documents sur papier, et placée dans un lieu hautement symbolique. Aucun autre poète de la Renaissance polonaise ne peut se vanter d’avoir eu ses vers gravés dans la pierre, et précisément sur le mur de la chapelle nouvellement érigée, attenante à la cathédrale de Cracovie, à proximité du château, sur la colline royale de Wawel, donc dans un lieu prestigieux et souvent visité : Ne mirere hospes decus hoc sublime sacelli Saxaque Phidiaco sculpta magisterio. Hoc statuit Sismundus opus qui struxit et arcem, Clarior hic recta sed ratione labor. Illum ne credas dum momentanea condit Atria perpetuam posthabuisse domum 40.

orsque le roi igismond er a fait construire dans un nouveau style une chapelle funéraire attenante à la cathédrale, entre 1517 et 1527, et a confié le travail à l’atelier de Bartolomeo Berecci, il a introduit durablement des modèles de la Renaissance italienne dans le pays 41. Les affinités entre

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« Ad sacerdotes, ut atente orent », Carmina, op. cit., p. 19. « Aux prêtres. Non seulement avec tes lèvres, mais avec toute ta raison, prêtre, tu dois prier si tu désires que tes demandes aient de la orce. l y a de l’inspiration mais ieu n’entendra pas la voi de tes l vres si elle ne vient pas d’une me vraiment pieuse .  39 . Juszy s i, Dykcyonarz poetów polskich, racovie, ru arnia J ze a alec iego, 1820, p. 226. Je garde l’ort ograp e ancienne. e sont, d’apr s Juszy s i, des vers aisant partie de la pré ace d’un sermon pour le Vendredi aint d’Aurelius ippus, imprimé à Pozna (s’agit-il de l’édition s.l. de 1568 ou d’une autre s.l.n.d. ?) : « Si tu veux habiter après la mort dans le ciel avec les anges, lis cet écrit, car, même si tu es dur comme une pierre, tu c angeras et tu deviendras vertueu au nom de Jésus rist . ne intuition, e primée par Juszy s i en 1820, qu’il serait possible de trouver d’autres compositions de Krzycki en langue polonaise, sous forme de préfaces ou de dédicaces dans des livres d’autres auteurs, serait-elle juste et inviterait-elle à des recherches sur le sujet ?  40 Carmina, op. cit., p. 79-80. « e t’étonne pas, visiteur, de cette c apelle si magni iquement décorée, ni des pierres sculptées sous l’égide de Phidias. Sigismond a érigé cette œuvre, le même qui a aussi bâti le château. Ce dernier ouvrage est plus célèbre à juste titre. Ne crois pas qu’en construisant des bâtiments en ce monde, il ait dédaigné la demeure éternelle ».  41 St. Mossakowski, Kaplica Zygmuntowska (1515-1533). Problematyka artystyczna i ideowa mauzoleum króla Zygmunta I, Varsovie, iber Pro Arte, 2007 pour les inscriptions, voir p. 332-334 ; . Janic i,  38

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certains aspects de l’œuvre de Cricius et le programme iconographique de la chapelle, riche et cohérent, sont bien visibles 42. Au-delà de la part qu’il a peutêtre prise à l’inspiration et à la rénovation du château lui-même, au-delà de la louange qu’il exprime dans nombre d’épigrammes sur différents aspects de ces travaux, la majeure partie des inscriptions présentes aussi à l’intérieur de la chapelle est de lui 43. À l’époque, graver des vers sur les murs des bâtiments importants était déjà une tradition parfaitement ancrée en Pologne ; le faire dans cet édifice prestigieux signifiait, encore une fois, s’attacher à une tradition mais sous une nouvelle forme exigée par des temps nouveaux, et Krzycki y était expert 44. Les épigraphes de la chapelle s’inscrivent dans le programme épigraphique de la cathédrale, minutieusement reconstruit, comme le voulait le nouvel esprit antiquaire humaniste. Les mots gravés dans la pierre ont pourtant su mettre les chercheurs de l’héritage littéraire de Cricius dans l’embarras : le Corpus Cricianum a accueilli les travaux d’autres épigraphistes et poètes, rendant l’établissement du véritable héritage poétique de Krzycki plus difficile. La majeure partie des manuscrits du poète, un ensemble appelé Corpus Cricianum, n’est pas univoque il correspond en grande partie au dossiers de G rs i, employé de la chancellerie royale et collaborateur de Tomicki, mais on ne connaît pas leur histoire antérieure. Ces documents ont constitué la base des Acta Tomiciana et contiennent des lettres et des poèmes de Krzycki, mais l’ensemble a été recueilli à partir d’actes de Piotr Tomicki et non d’Andrzej Krzycki luimême ; les provenances de nombreux ajouts postérieurs sont aussi difficiles à établir 45. Une édition plus complète, même si elle est loin d’être exhaustive, est celle de azimierz ora s i datant de 1888 46. Elle a aujourd’hui besoin d’être remplacée par une édition établie selon les standards de la philologie

« ns rypc e ryz aplicy ygmunto s ie , Biuletyn historii sztuki, 67e année, n° 1-2, 2005, p. 131-141. Voir J. Pelc, Literatura [...], op. cit., p. 68.  42 Voir t. ossa o s i, op. cit., p. 244 et 253-254.  43 Ibidem, p. 280-281. Voir E. Busze icz, op. cit., p. 93.  44 Très probablement Krzycki était aussi l’auteur d’épitaphes d’autres membres de la famille royale (de la premi re ille du roi, Anna, morte tr s eune, et d’El bieta, épouse du roi asimir V). Voir . A. Janic i, « aginione ins rypc e poetyc ie atedry a els ie (do o ca V ie u) , Studia Waweliana, vol. 11-12, 2002 2003, p. 43-52.  45 Pour l’édition des inscriptions, voir St. Komornicki, « Kaplica Zygmuntowska w Katedrze na Wawelu 1517-1533 », Rocznik Krakowski, vol. 23, 1932, p. 116-117 et 141 ; . A. Janic i, Zaginione inskrypcje […], op. cit., p. 43-52 ; St. Mossakowski, op. cit., p. 340-341 et in nota ; J. iesio o s i, « rnic iego ode su orpus ricianum . Przyczyn i do dzie poez i pols o- aci s ie , Pamiętnik Biblioteki Kórnickiej, vol. 15, 1979, p. 239-247 et le ms de la bibliothèque du Séminaire diocésaine de Sandomierz, Poemata Andree Cricii episcopi, coll. 1688. Aussi Corpus Inscriptionum Poloniae, vol. VIII, Województwo krakowskie, éd. A. Perzanowska et R. M. Zawadzki, Cracovie, Unum, 2002.  46 K. Morawski, Carmina, op. cit. L’édition a eu lieu dans le cadre de la collection Corpus Antiquissimorum Poetarum Poloniae Latinorum, vol. 3. Les éditions et les codex manuscrits que l’auteur de l’édition dit avoir utilisés, Praefatio, p. - V , nécessitent au ourd’ ui une véri ication. Pour une liste des uvres publiées séparément, du xixe au début du xxe siècle, et qui ne furent d’ailleurs pas très nombreuses, en version originale et en traduction polonaise, voir Piśmiennictwo staropolskie, op, cit., loc. cit.

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moderne 47. l e iste aussi en Pologne des ant ologies d’ uvres de rzyc i, encore plus restreintes, des traductions en polonais – qui devraient aussi être renouvelées 48. Vu cette situation pour le moins di icile quant au rec erc es sur les fonds, est-il possible de juger d’ores-et-déjà de l’importance du personnage de Cricius ? Avant même d’entreprendre les travaux éditoriaux qui ne pourront être que des travaux d’envergure, il est nécessaire de comprendre combien Krzycki est un personnage complexe. À nos yeux il semble être fait de paradoxes. Nous avons affaire à un ecclésiastique et à un courtisan (politicien et noceur) à part entière, en même temps qu’à un poète néo-latin, qui pose pourtant les bases de la poésie polonaise à venir. Sa façon d’aborder les thèmes érotiques, tout comme ceux de la politique, sera chère encore à l’ère baroque, et la présence des motifs mythologiques qu’il introduit en premier dans « les terres des Boréades » deviendra un des traits constants de la littérature polonaise. Héritier de la tradition des formes classiques, il sait expérimenter et jouer avec les mètres de l’antiquité comme avec ceux du Moyen Âge. Cet inventeur d’une nouvelle forme poétique encomiastique (qui se révèlera très durable) ose la transformer, quand il le veut, en poignante poésie satirique, même à l’encontre de la reine. Sa plume inspire la peur mais en même temps rend ses compagnons, amis et ennemis, présents à la mémoire des siècles. Krzycki serait-il donc en quelque sorte l’Arétin polonais ? Entouré pendant plusieurs siècles de la légende noire d’un vengeur malicieux et hors pair, il a laissé pourtant des lettres, preuves d’un attachement sincère à son oncle Tomicki et un testament témoignant d’une bienveillance et d’une générosité à la fois envers ses diocèses et ses proches. Contre-réformateur avant la lettre, son nom est porté sur l’un des premiers index polonais parce qu’en admirateur d’Érasme, il intitule son œuvre Encomia Lutheri. Krzycki semble pourtant et avant tout un homme si bien ancré dans son époque qu’il arrivait à regarder loin dans l’avenir politique, littéraire et religieux.

 47 Voir les renvois au manuscrits du po te par . Ganszyniec, Rękopisy poezyj A. Krzyckiego, Cracovie, pra ozdania PA , 1948, n 8 ; idem, Pamiętnik Literacki, 1923-1928 1923, 20e année, p. 155-169 ; 1924 1925, 21e année, p. 203-205 ; 1925 1926, 22e année, p. 248-350 ; 1928, 25e année, p. 55-70, sur les difficultés d’établir le corpus définitif de l’œuvre du poète. L’auteur parle des nombreux « pseudoCriciana » et apporte des corrections à l’édition de Morawski ; voir aussi idem, Przegląd Klasyczny, vol. 3, 1937, p. 16. ’autres dé aillances de cette édition ont été relevées de mani re détaillée par t. imina, « Crana », Pamiętnik Literacki, vol. 37, 1947, p. 168-176 ; voir aussi J. Pelc, Europejskość [...], op. cit., p. 454.  48 Antologia poezji polsko-łacińskej 1470-1543, éd. A. Jelicz, Varsovie, P , 1956, réédition modi iée zczecin, yda nict o « Glob , 1985, p. 149-212. rzyc i est représenté par 74 poésies et il igure parmi dix autres noms ; les poésies sont groupées par thèmes. Andrzej Krzycki, Poezje, éd. A. Jelicz, trad. E. J dr ie icz, Varsovie, P , 1962, contenant 85 po mes (les vers sont en polonais uniquement, il y a un inde des incipits latins). ’autres traductions, provenant de la période apr s 1850 et restant inédites, ont été retrouvées dans les manuscrits de la Bibliot que ationale à rni , voir J. osdor , « Poez e rzyc iego prze adzie ygmunta cle s iego , Meander, 14e année, 1959, n° 1, p. 51-59.

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C’est justement à Andrzej Krzycki qu’il est revenu d’instaurer l’obligation de prêcher en polonais dans l’église mariale de Cracovie, où jusqu’alors seules avaient été données des homélies en allemand 49. C’était sûrement le signe d’un changement radical de la conscience et de l’identité linguistiques, tant de la part des bourgeois cracoviens que de la hiérarchie ecclésiastique du pays : encore une intuition paradoxale de la part d’un poète néo-latin, archevêque et primat de Pologne.

Voir Monumenta Medii Aevi Historica Res Gestas Poloniae Illustrantia, Kodeks dyplomatyczny katedry krakowskiej, , éd. F. Pie osi s i, racovie, A ademia mie tno ci ra o s a, 1883, vol. 8, p. 187189 ; . aszyc i, « dzia mieszczan ra o s ic alce o zy pols i , in Krakowskie odrodzenie, éd. J. bro s i, racovie, yda nict o iterac ie, 1954, p. 63-77, surtout p. 69, 71, et 73-74.  49

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