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L'opération "Boléro-Paprika" ou la protection des étrangers a l'épreuve de
la guerre froid. par Phryné Pigenet
Publié à la Revue d'Histoire Moderne et contemporaine 46 2 avril-juin 1999

Le 7 septembre 1950, à l'heure du laitier, la police réalise sur
l'ensemble du territoire français un des plus vastes coups de filet de la
guerre froide. Deux cent quatre vingt huit personnes, toutes étrangères,
espagnoles pour la plupart, sont interpellées et, bientôt, expulsées ou
assignées à résidence[1]. L'opération Boléro-Paprika commence[2].


1: Une opération "coup de poing".

Une affaire d'envergure

L'événement surprend par son ampleur: sur les quatre cent quatre
arrêtés d'expulsion prévus, deux cent quatre-vingt-huit intéressent les
Espagnols. La répression atteint inégalement le territoire français,
reflétant l'ardeur inégale des autorités. Les réfugiés installés dans le
Sud-Ouest paient le plus lourd tribut avec cent soixante dix sept
interpellations, soit 17 fois plus qu'en Région Parisienne[3]. A Toulouse
même, haut lieu de l'exil républicain, l'hôpital Varsovie[4] perd la
totalité de son corps médical.
La répression affecte aussi les organisations et les publications
communistes. Après l'interdiction, le 26 août, de Nuestra Bandera et de
Lluita, le 1er septembre, la mesure est étendue, le 7, à Mundo Obrero[5].
Le même jour, les dissolutions du PCE et du PSUC[6] sont prononcées ainsi
que celle de l'association qui servait de prête-nom aux militants du PCE:
"les Amis de Mundo Obrero". D'autres organisations de la mouvance
communiste suivront, telles l'Amicale des guérilleros et la Fédération des
Espagnols résidant en France et sa revue La Voz de Espana[7].
Les moyens mis en oeuvre - mobilisation à Paris de 60 cars de police,
de 150 inspecteurs de la Surveillance du Territoire et de plusieurs
centaines de gendarmes dans les départements du Midi -, donnent la mesure
de l'opération[8]. Une des victimes toulousaine raconte: "... L'aspect du
Camp des Sables où nous fûmes conduits était imposant; soldats et CRS
armés, postes de fusils-mitrailleurs etc., rien n'avait été épargné pour
nous impressionner(...). Approximativement à 9 heures du matin, je fus
embarqué dans un camion. Le trajet existant entre la baraque où nous
étions, une partie des détenus et le camion, nous l'avons parcouru entre
une haie double de S.S. [ sic ] qui prétendaient nous effrayer en criant et
se moquaient de nous en disant: " Allez vite, Mundo Obrero, vite
communistes, salauds, etc."[9].
Dans un premier temps, la presse accorde une certaine importance à
l'événement. En premier lieu, les organes communistes qui s'indignent et
accusent. " Au mépris du droit d'asile, près de 300 arrestations
d'antifranquistes espagnols et de démocrates immigrés" titre l'Humanité
tandis que le Patriote dénonce le "Coup de force du Gouvernement contre les
républicains espagnols sous la pression de Franco". Toutefois, l'opération
fait également la "une" d'autres journaux. Le quotidien régional, La
Dépêche du Midi annonce, sur un ton neutre: "A Paris comme en province, la
police a opéré une rafle monstre contre les communistes étrangers résidant
en France". Le Figaro, en revanche, n'hésite pas à s'engager. "A Paris,
dans le Nord, le Sud-Ouest et le Sud-Est, vaste opération de police contre
les cinquièmes colonnes établies en France par les PC étrangers" assure sa
manchette. Bientôt, cependant, l'intérêt s'estompe et seule les
publications communistes continuent de couvrir l'affaire. A la fin de
l'année, Ce Soir la fait rebondir par une série de reportages sur les
conditions de vie des réfugiés assignés en Algérie et en Corse[10]. Publiés
à point nommé, alors que la polémique fait rage autour du procès David
Rousset[11], les articles émeuvent une partie de l'opinion française, très
sollicitée en ces temps de guerre froide.

Les réfugiés espagnols: cinquième colonne ou boucs émissaires?

Interrogé par le président de la Ligue des Droits de l'Homme sur les
garanties juridiques accordées aux assignés, le ministre de l'Intérieur,
Henri Queuille, fait une réponse révélatrice de l'état d'esprit des
responsables gouvernementaux: " Je n'insisterai pas davantage sur les
dangers que comporte actuellement la guerre ouverte menée, à l'intérieur et
de l'extérieur, contre les institutions du monde libre, et contre celles de
la France en particulier. Les intéressés sont de mauvaise foi, argumente-t-
il, lorsqu'ils prétendent ignorer les motifs de leur inculpation, tous
appartenaient au Parti communiste espagnol ou à ses organisations annexes
et y militaient activement. Tous, ajoute-t-il, obéissaient aveuglément à
des consignes venues de l'extérieur". Par suite, " le Gouvernement a dû se
résoudre, devant la gravité et l'imminence du péril à les écarter
provisoirement du territoire métropolitain et à les assigner à résidence en
des lieux où ils puissent plus facilement être surveillés et leur action
neutralisée."[12]
Nous sommes alors en février 1951, les perquisitions réalisées aux
domiciles des militants n'ont apporté aucun élément susceptible d'étayer
l'inculpation d'atteinte à la sûreté de l'Etat[13]. Le ministre se garde
d'ailleurs d'insister sur ce point. Pour l'heure, l'unique charge retenue
vise leur appartenance à un parti. Communiste et étranger, il est vrai...

La peur de l'étranger et le débat autour du statut des réfugiés.

A l'évidence, le zèle de certains hauts fonctionnaires a précipité le
déclenchement d'une opération dont la maîtrise juridique s'avère délicate.
Dès sa prise de fonction en 1948, le préfet de la Haute Garonne[14], Emile
Pelletier, organise une conférence des préfets du "grand Sud" sur "le
problème espagnol". Les solutions préconisées alors devaient guider
l'action administrative et policière à venir[15].
L'objet de la conférence se comprend mieux si on la replace dans le
cadre plus large de la résistance opposée par les hauts fonctionnaires des
ministères de l'Intérieur et du Travail à la ratification de la Convention
de Genève sur les réfugiés. G. Noiriel insiste, à juste titre, sur la
double préoccupation de ces administrations soucieuses de contrôler
l'intense activité politique des réfugiés espagnols et de sauvegarder les
intérêts de la main-d'oeuvre nationale menacée par la concurrence des
clandestins. Le Travail et l'Intérieur désapprouvent le "laxisme" du
représentant de l'O.I.R. grâce auquel les Espagnols obtiennent trop
facilement le statut de réfugié. Dans ce contexte, la future ratification
de la Convention de Genève suscite les plus vives inquiétudes. En tout état
de cause, ce texte doit être amendé[16].
Entrent également en ligne de compte l'itinéraire suivi, la formation
reçue, pour ne rien dire des héritages administratifs dans les attitudes
adoptées. Sans adhérer complètement aux thèses de G. Mauco[17], la majorité
des préfets présents à la réunion de 1948, déjà en poste avant la Seconde
Guerre mondiale[18], ont une tradition de méfiance à l'égard de l'étranger,
plus particulièrement du réfugié politique, jugé "le moins
assimilable"[19].
Dans cette perspective, les autorités s'efforcent d'accumuler les
preuves utilisables contre les éléments "indésirables". Régulièrement
recensée, la population espagnole fait l'objet d'une attention soutenue de
la part des services préfectoraux, déterminés à trier le bon grain de
l'ivraie. Il ne s'agit pas, en effet, d'intimider la masse des réfugiés
mais d'empêcher que "les agitateurs qui sont aux ordres de certains partis
ou de certaines nations viennent troubler notre paix en France". Il importe
"en même temps de réagir contre d'autres éléments qui constituent une
catégorie de gens qui sont venus en France, fuyant pour la plupart la
justice de leur pays et qui se présentent à nous, souvent comme des
réfugiés politiques, alors qu'ils veulent s'écarter des mesures générales
qui peuvent les frapper dans tous les pays"[20]. Concrètement, ce second
groupe désigne, dans la typologie préfectorale, la fraction de la mouvance
anarchiste lancée, à la fin des années 1940, dans des actions de vols à
main armée, parfois sanglants, organisés tant en France qu'en Espagne et
dont le butin sert, en principe, à financer la guérilla péninsulaire. Bête
noire des services secrets franquistes, ces "terroristes" inspirent maints
articles dans la presse espagnole prompte à dénoncer la bienveillance des
autorités françaises envers ces "bandits" protégés par leur statut de
réfugiés politiques. De fait, certains fonctionnaires de la Surveillance du
Territoire permettront à plusieurs praticiens de "l'action directe"
d'échapper aux poursuites de la police française[21]. Emile Pelletier, ami
personnel du consul de Barcelone et membre de la Commission internationale
des Pyrénées qui tâche de redonner vie aux relations transfrontalières[22],
n'est pas insensible aux protestations de Madrid. Prêt à sévir nominalement
contre les auteurs de ces méfaits, il se refuse à frapper l'ensemble des
anarchistes espagnols. Une note du commissaire central éclaire les raisons
du préfet[23]. Outre les relations nouées par des hommes politiques
influents avec les principaux dirigeants libertaires, ces derniers auraient
accepté de " soumettre leur action à un contrôle secret des autorités
françaises". De plus, le M.L.E.-C.N.T[24]. apparaît comme "la seule
organisation qui puisse rivaliser avec le PCE à l'égard duquel les
libertaires professent une haine tenace." D'ailleurs "en cas de troubles
auxquels participeraient les communistes espagnols, ses militants seraient
résolus à intervenir pour neutraliser leur action".
En quête de preuves confirmant l'activité subversive du PCE, les
autorités étendent leurs investigations aux organisations satellites, sans
parvenir à étoffer sérieusement le dossier judiciaire. Il n'en va pas de
même en matière d'informations policières, ce dont rend compte l'abondance
de sources en provenance du ministère de l'Intérieur.
Longtemps inaccessibles à la plupart des historiens, elles n'ont
guère nourri la réflexion des rares élus admis à bénéficier de dérogations
miraculeuses ou douteuses.


2: Aux origines de l'opération.


Du fait divers à l'offensive contre le PCE.

La malle sanglante du Lac de Gironis.

Le 10 avril 1950, un promeneur est intrigué par la présence d'une
caisse qui, à moitié enfouie au fond du lac de Gironis, dans la banlieue
toulousaine, émerge curieusement. Alertée, la police repêche la malle. Elle
contient le corps sans vie de Redempcion M., réfugiée espagnole, employée
d'épicerie dans la capitale du Languedoc. Très vite, l'enquête s'oriente
vers les milieux communistes ibériques de Toulouse[25]. La victime,
affiliée aux Jeunesses communistes en 1947-1948, aurait rejoint le
mouvement dissident de Comorera[26]. La disparition de son mari, agent de
liaison du PCE, au cours d'une mission en Espagne serait à l'origine d'une
grave dispute avec les locataires d'un appartement attenant à l'épicerie,
tous membres de l'appareil clandestin du parti. La crainte d'une
dénonciation expliquerait l'assassinat de la malheureuse, doublement
suspecte aux yeux des militants. Leur fuite précipitée semble corroborer
l'hypothèse[27].
Jetée en pâture à la presse[28], l'affaire politico-criminelle ravive
l'intérêt porté aux activités souterraines d'une organisation soupçonnée
d'être au service de l'espionnage soviétique. Depuis la découverte d'un
dépôt d'armes à Barbazan[29], dans un chantier de la compagnie forestière
Fernandez-Valledor, le 17 février 1950, le député MRP de Saint-Gaudens, M.
Coste-Floret ne cesse de réclamer l'interdiction du PCE et de ses filiales.
D'accord avec les conclusions du député, mais agacé par
l'intervention intempestive de la presse régionale et nationale[30], le
préfet de la Haute Garonne note "que l'affaire renvoyée devant le tribunal
militaire de Bordeaux ne conna(ît) pas de développements nouveaux". Cette
publicité, ajoute-t-il, aurait pu compromettre le succès de l'opération en
éveillant les soupçons des suspects espagnols"[31].
Spectaculaire, susceptible d'alimenter tous les fantasmes de
l'opinion publique, cette piste n'est, cependant, pas celle que privilégie
la préfecture. De ce côté-ci on s'intéresse davantage aux dépôts d'armes
qui menacent la sécurité intérieure et enveniment les relations avec
l'Espagne. Cette préoccupation n'est pas nouvelle et remonte aux lendemains
de la Libération[32].
S'agissant du PCE, auquel les autorités prêtent les pires intentions
en 1947, les soupçons se portent précisément sur l'entreprise Fernandez-
Valledor. Sans succès. Le 24 décembre 1947, un rapport de police signale:
"En ce qui concerne la région de Saint-Gaudens, où la présence de
guérilleros espagnols à Juzet d'Izaut ( Entreprise Valledor) est de
notoriété publique, la collaboration de ces derniers avec certains groupes
FTPF n'a pu être établie (...) En ce qui concerne les dépôts d'armes et
d'explosifs constitués au lieu-dit "Tour d'Ausseing", aucun dispositif n'a
pu être recueilli, pas plus sur son existence que sur les moyens de
transport de ce matériel"[33]. Si l'on ne peut mettre en doute la
constitution de stocks d'armes destinés à alimenter la guérilla intérieure,
l'échec des enquêtes policières confirme la discrétion des caches et... la
modestie des dépôts. On ne camoufle pas aisément un matériel lourd et
abondant, même sous le couvert d'une entreprise isolée au milieu des
bois[34].
Il faut attendre le mois de février 1950 pour voir les autorités
s'emparer, enfin, d'un important lot d'armes[35]. Cette saisie met en
branle l'appareil policier, stimulé dans sa volonté de remonter les
filières et de reconstituer l'organigramme communiste avant de le frapper.

Le PCE en France à l'aube des années 1950

La D.S.T. traque en premier lieu le secteur militaire du PCE. Sur les
traces de ce dernier, tout fait est monté en épingle, au risque de se
laisser abuser par des informateurs incertains[36].
Deux associations sont dans le collimateur des agents de la
Surveillance du Territoire. La première, l'AMERE[37] regroupe les anciens
militaires de carrière de l'armée républicaine espagnole. Née d'une
scission provoquée par les communistes en 1945, elle compterait 500 membres
- contre 3000 avant la rupture-, mais disposerait d'un précieux fichier
central, fort de quelques dix mille noms. Le rôle de l'AMERE, beaucoup plus
orientée vers les affaires intérieures espagnoles occupe moins les pouvoirs
publics que celui confié à l'Amicale des anciens FFI et résistants
espagnols[38]. Créée en 1945, puis légalisée en 1947, son but consiste, en
principe, à favoriser la réinsertion des guérilleros démobilisés et à
défendre leurs droits. Dans l'immédiat après-guerre, elle a ses entrées
dans plusieurs ministères obligeants à l'égard d'anciens résistants et
soucieux de parvenir à une bonne intégration des exilés espagnols[39].
Habitués aux travaux forestiers pratiqués dans les compagnies de travail de
la période 1940-1944, conscients des facilités qu'offrent les chantiers de
montagne pour l'accueil des militants, misant sur la pénurie des
combustibles[40], le général Fernandez et le colonel José Valledor ont
fondé, à l'instigation du PCE, une société qui, très vite, prend un essor
commercial remarquable. En 1949, elle est le premier fournisseur de
traverses de la SNCF. Son domaine ne cesse de s'étendre. Installée
initialement dans la commune de Juzet-d'Izaut en Haute Garonne,
l'entreprise ouvre de nouveaux chantiers dans l'Aude , l'Ariège, le Gers et
le Tarn. Elle emploie, en permanence 250 ouvriers , tous Espagnols, à
l'exception de cinq Français, mais peut, à tout moment, doubler ses
effectifs pour faire face aux commandes[41]. Au regard des 8 000
guérilleros démobilisés en 1945, l'effectif peut sembler dérisoire. En
réalité, il faut aussi compter les "saisonniers", souvent des militants en
cours de recyclage, revenus d'Espagne ou se préparant à relayer les
volontaires des guérillas intérieures. Plus modestes, d'autres entreprises
jouent un rôle similaire, à l'exemple de la coopérative sandalière de Pau
dirigée par le commandant Paco, sise au coeur d'une région où résident plus
de 150 guérilleros[42]. De nombreux chantiers EDF et les carrières de Midi-
Pyrénées emploient, par ailleurs, des centaines d'ex-maquisards[43]. Cette
concentration n'a pas manqué d'alarmer les fonctionnaires du ministère de
l'Intérieur.
A Toulouse même, l'amicale dispose d'un hôpital, source de bien des
jalousies[44]. A la Libération, les FFI avaient réquisitionné, rue de
Varsovie, un immeuble mis à la disposition des résistants espagnols blessés
ou malades. Cet hôpital improvisé allait fonctionner au bénéfice et sous la
responsabilité de l'Amicale des Guérilleros jusqu'à la dissolution de
l'organisation en 1950. Le personnel - médecins compris - et les malades
demeurèrent exclusivement espagnols. Les anciens malades s'en souviendront
comme d'un hôpital hors du commun où il régnait une ambiance joyeuse et
familiale[45]. La gestion administrative et financière de l'établissement,
conventionné par la Sécurité sociale devait être irrépochable. "Certains
affirment que l' hôpital peut vivre avec ses propres ressources, malgré les
frais qui sont à sa charge", notait le préfet qui, aux aguets, observait
que "l'hôpital Varsovie passe pour être une couverture en France et plus
particulièrement dans le sud-ouest du Kominform ". "Le directeur actuel est
le docteur Bosch Farjane", poursuivait-il, "la BST a longuement enquêté sur
son compte et, bien qu'il soit très difficile d'en apporter la preuve, il
semble que Bosch soit un des agents principaux de la branche espagnole du
Kominform"[46].
La réussite économique indéniable des entreprises dépendantes du PCE
ne pouvait que conforter l'image d'un mouvement communiste espagnol
puissant, voire riche, en particulier dans le Midi. Une étude plus
approfondie nuance, cependant cette impression.
Handicap de taille, à la différence des autres partis républicains
espagnols, le PCE n'a jamais eu une existence explicitement légale, pas
même à la Libération. Ainsi, ses journaux ne sont pas exposés dans les
kiosques, mais diffusés en vente militante. Les seules cartes détenues par
les adhérents sont celles d'une association enregistrée officiellement sous
le nom des Amis de Mundo Obrero. Membres d' associations culturelles et
régionales, ils se distinguent mal de la masse des sympathisants
communistes. La valeur des comptabilisations policières s'en ressent[47].
Depuis 1948, l'organisation a perdu, en outre, une partie de ses forces
sous l'effet des dissidences "titiste" et " comorériste". Celle-ci résulte
moins des soubresauts du mouvement communiste international que des
relations toujours délicates établies entre Castillans et Catalans sur
fond d'incertaines divergences politiques et d'authentiques conflits de
personnes. L'échec patent de la guérilla dans la péninsule, la critique
ouverte de ce mode d'action par les militants de l'intérieur[48] repliés en
France contre l'avis des dirigeants, l'isolement des communistes au sein de
l'exil et les avancées diplomatiques du régime espagnol poussent à une
douloureuse réévaluation tactique. Au tournant des années 1940-1950, le PCE
renonce ainsi à la lutte armée et opte pour le noyautage des organisations
franquistes, notamment syndicales. Par suite, l'entraînement guérillero et
les dépôts d'armes perdent leur caractère vital.
Dans l'attente des premiers résultats du réenracinement en cours, le
PCE, totalement dévoué à l'Union Soviétique et désireux de trouver un
dérivatif à son malaise interne, engage le gros de ses forces, présentes en
France, dans la campagne de soutien à l'appel de Stockholm. Au mois d'août
1950, Mundo Obrero[49] annonce 301 004 signatures dont 183 333 recueillies
sur le territoire français. Au regard du nombre des réfugiés espagnols[50],
ces données, pour autant qu'elles soient crédibles, montrent que les reculs
subis n'ont pas anéanti, loin de là, les capacités militantes de
l'organisation. Pour leur part, les autorités n'ont pas de doute à ce
sujet et s'en désolent à l'heure où l'Etat français révise sa position vis
à vis de l'Espagne franquiste.


Logiques gouvernementales: anticommunisme intérieur et considérations
diplomatiques.

Peu après la guerre de Corée la tension est à son comble en septembre
1950. Mais si la peur qu'engendre ce conflit n'est pas totalement étrangère
aux précautions prises par le gouvernement, il faut remonter aux grèves de
1947-1948 pour comprendre la phobie des responsables français envers les
communistes espagnols. En témoignent les notes par lesquelles le président
de la République accuse le 29 octobre 1948[51], "la foule criminelle des
communistes espagnols [d'avoir] attaqué le service d'ordre avec des
grenades à manche (reliquat des armes allemandes )" et "d'être à
l'origine des heurts et des incidents mortels qui ont accompagné la reprise
des puits à Alès et à Saint Etienne". Paul Ramadier, Jules Moch, René
Pleven partagent sa manière de voir. A tour de rôle, tous prennent des
mesures d'assignation à résidence de militants espagnols soupçonnés
d'ingérence dans les affaires intérieures de l'Etat français. En butte à
l'hostilité systématique des ministres de l'Intérieur qui les tiennent pour
de dangereux agitateurs au service de l'URSS et du PCF[52], ils ne sont pas
mieux considérés par le Quai d'Orsay qui souhaite la normalisation des
rapports franco-espagnols.

De 1946 à 1948, en effet, la fermeture de la frontière pyrénéenne
avait réduit au strict minimum les relations entre les deux Etats. En 1948,
la détente s'amorce: Paris et Madrid échangent des chargés d'affaire, et
l'on allège les contrôles frontaliers. Deux accords commerciaux signés le
8 mai 1948 et le 14 juin 1949 régularisent la situation. Sensible aux
opportunités politiques ouvertes par la guerre froide[53], le gouvernement
espagnol présente ses doléances et réclame plus de sévérité à l'endroit des
opposants réfugiés chez son nouveau partenaire. Le ministre de l'Intérieur
donne quelques gages. Coup sur coup, Jules Moch fait annuler les
délibérations de conseils municipaux hostiles au franquisme, exige une
enquête sur les incidents survenus à la cité universitaire à Paris et au
consulat de Lyon, éloigne du Sud-Ouest les exilés espagnols jugés trop
actifs[54].
Mais il y a plus. Dans ce contexte, la tolérance manifestée envers
une organisation dynamique et ses entreprises de couverture, la
concentration de militants dans la zone frontalière ne paraissent plus
menacer le seul Caudillo. Au plus fort de l'affrontement Est-Ouest, les
communistes espagnols, que dessert leur réputation d'héroïsme et
d'efficacité, font figure de redoutables agents subversifs, voire
d'éléments avancés de l'Armée Rouge. Qu'importe, dès lors, si le départ,
pour Prague, de la direction du PCE et l'abandon de la guérilla tendent à
infirmer une telle interprétation. La surprise des militants et l'apparente
indifférence des plus hauts cadres du Parti, peu affectés par l'opération
engagée contre les "militaires" en voie de marginalisation politique, ne
donnent pas moins à réfléchir. Par bien des côtés, l'opération "Boléro"
revêt l'aspect d'un vaste malentendu et d'une répression à contre-temps.


3: Commodités et limites de la repression administrative.

Un vide dans le droit: "l'urgence absolue".

Aux dires du ministre de l'Intérieur, l'affaire est grave et touche à
la sûreté intérieure de l'Etat. Or les perquisitions n'apportent pas les
preuves accablantes attendues. Tout au plus, les policiers, encombrés par
les tonnes de brochures saisies, mentionnent la confiscation de matériel
radio. Faute de mieux, le ministre se résout à invoquer l'argument
d'autorité intenable à la longue[55]. Les réfugiés, pourvus d'un titre de
résident, jouissent, en effet, de la protection légale que leur confèrent
les articles 23 à 25 de l'ordonnance du 2 novembre 1945. Celle-ci prévoit,
après notification à l'intéressé, la possibilité de recours contre un
arrêté d'expulsion devant une commission départementale spéciale[56].
Toutefois, cette procédure n'est pas applicable en cas "d'urgence absolue".
Reste à définir dans quelles circonstances le ministre de l'Intérieur peut
invoquer "l'urgence absolue". La Convention de Genève admet la levée des
garanties offertes à l'exilé en cas " de raisons impérieuses de sécurité
nationale", ce qui est plus précis et restrictif que le texte de
l'ordonnance. Las, la convention ne prendra place dans le droit interne
qu'après le vote de la loi du 25 juillet 1952, instituant l'OFPRA et la
commission des recours pour les réfugiés. En attendant les expulsés ne
bénéficient d'aucun recours juridique. Jusqu'en 1955, le Conseil d'Etat
refusera de contrôler le bien fondé de "l'urgence absolue"[57]. C'est donc
en pleine connaissance de cause que le ministre de l'Intérieur déclenche
l'opération "Boléro". Remarquons, cependant, que dans le passé, les
prédécesseurs de Queuille ont parfois rappelé à l'ordre des subordonnés
trop maladroits et gaffeurs, à l'exemple de ce préfet de l'Aude qui, "pour
être tranquille, [souhaitait] mettre [les exilés] dans une résidence
forcée, derrière les barbelés ou dans un camp de concentration"[58].
Informé, le ministre s'empressa de rédiger une circulaire adaptant les
mesures d'éloignement de la frontière au statut juridique des personnes
concernées. Il se trouve qu'en 1950 les anciens guérilleros possèdent, pour
la plupart, une carte de résident privilégié délivrée à la Libération[59].
L'arrêté d'expulsion assorti d'assignation à résidence dans le département
d'accueil est ici, en conformité avec la circulaire de 1948, la seule
décision possible, "à moins que les intéressés n'aient encouru des
condamnations de droit commun permettant d'engager sans inconvénient la
procédure de la déchéance de la qualité de privilégié"[60].
Le vide juridique et la notion de "devoir de neutralité politique"
laissée à l'appréciation des fonctionnaires conjuguent leurs effets au
détriment des expulsés. Plusieurs personnalités s'en émeuvent. L'abbé
Pierre, le secrétaire général de l'organisation hollandaise des résistants
et anciens prisonniers, le professeur Basdevant, président de la Cour
Internationale de la Haye prennent ainsi publiquement position et
contraignent le ministre de l'Intérieur à la défensive, tandis que de
nouvelles protestations s'élèvent à propos des conditions de vie des
assignés[61].


L'accueil des assignés: improvisation et précarité.


A l'exception d'une minorité -33- expulsée de gré ou de force en RDA,
l'écrasante majorité des assignés à résidence atterrit en Corse -65- et en
Algérie -81-. Les premières semaines, les autorités françaises insistent
ironiquement sur le faible nombre de départs volontaires vers les pays de
l'Est. Ces choix n'ont pas d'ailleurs toujours la signification qu'on leur
prête. Instruits par l'expérience des années précédentes, beaucoup de
réfugiés pensent que la mesure sera provisoire et qu'ils pourront rejoindre
leur famille. Très vite, pourtant, il leur faut déchanter. Le séjour
s'annonce plus long que prévu alors même que les conditions d'accueil
s'avèrent être déplorables. Tous ne trouvent pas sur place un travail
équivalent à celui qu'ils occupaient jusque là. Le recul des rémunérations
est général. Les statistiques élaborées à partir de deux échantillons
d'assignés[62] permettent de dessiner le profil professionnel et familial.
Les trois quart des hommes sont mariés et en charge d'enfants. Agés de 45
ans en moyenne, plus des deux tiers sont ouvriers et parviendront plus
facilement à se réinsérer que leurs camarades employés ou membres de
professions libérales. L'itinéraire personnel de beaucoup de militants,
anciens combattants de l'armée républicaine, internés dès leur arrivée en
France, résistants et, parfois, déportés, a malmené les corps. En Algérie,
quatre assignés doivent bientôt être hospitalisés. En Corse, on dénombre
treize malades chroniques. Les assistantes sociales dépêchées par le
Service social de la main d'oeuvre étrangère soulignent l'extrême
médiocrité des logements offerts. Plusieurs réfugiés sont hors d'état de
pourvoir aux besoins des leurs, privés, par ailleurs, des allocations
familiales, voire des bourses d'étude attribuées à leurs enfants[63]. La
presse se fait l'écho de ces situations qu'atténue ou aggrave, selon les
cas, l'attitude de la population locale. Un journal indépendant de Bastia,
Corse Nouvelle, règle ses comptes avec l'Italie, en dressant un parallèle
entre "ceux qui, hier, nous ont poignardé dans le dos [...] et les
combattants authentiques qui se sont, résolument et sans arrière-pensées,
rangés sous les plis de nos drapeaux dans l'âpre combat pour la libération
du territoire...". Tous les témoignages s'accordent pour mettre en valeur
l'élan de solidarité de la population corse à l'égard des assignés. En
Algérie, la situation est plus mitigée. Les édiles locaux s'inquiètent de
cette arrivée massive de communistes qui risque de renforcer l'agitation
indigène. Une assistante sociale constate qu'après un premier mouvement
d'hostilité, généré par une violente campagne de presse, "les relations
entre les expulsés et la population sont devenues bonnes". Malgré
d'indéniables témoignages de solidarité, rares sont les assignés qui
envisagent de s'enraciner dans de telles conditions. 44,6 % d'entre eux
demandent la révision ou le report de l'arrêté pris à leur encontre. Seule
une minorité ( privilégiée ) - 6,2 % - obtiendra gain de cause. Sensibles,
peut-être, à la campagne orchestrée en Pologne, Hongrie et Tchécoslovaquie,
76% des autres finiront par demander asile à ces pays[64].

Un bilan en demi-teinte

Embarrassées, les autorités publiques ont cependant atteint leur but
principal. Dans plusieurs départements frontaliers, les directions locales
du PCE sont, pour un temps, décapitées. L'activisme communiste marque le
pas, voire régresse tandis que la menace de nouvelles expulsions continue
de planer sur les militants qui tenteraient de reconstituer une
organisation interdite[65]. En 1956, encore, des interpellations et des
assignations à résidence apparaîtront comme les tardifs et ultimes
prolongements de l'opération "boléro"[66].
D'un strict point de vue diplomatique, enfin, les relations avec le
régime franquiste, attentif et satisfait du déroulement de l'affaire,
entrent dans une phase nouvelle. Le 12 janvier 1951, la France nomme son
premier ambassadeur officiel à Madrid depuis la fin de la guerre.
Contre toute attente, le PCE adopte un profil bas et se garde de
relever le défi que lui lance le gouvernement français malgré les rigueurs
imposées à des centaines de ses membres.
De fait, tous les témoins interrogés[67] certifient avoir été avertis
de l'opération qui se préparait contre eux. Au début de l'été, les
militants les plus exposés avaient reçu la consigne de ne pas dormir chez
eux. Ne voyant rien venir, la vigilance n'allait pas tarder à se relâcher
jusqu'au 6 septembre, date à laquelle, pendant la fête de l'Humanité, la
direction annonça l'imminence d'une action policière. Les dirigeants,
demeurés en France, plongèrent sur le champ dans la clandestinité. On l'a
dit, l'opération "Boléro" frappa, en priorité, la mouvance militaire du
PCE. De là, l'acharnement montré contre les employés de l'entreprise
Valledor et la recherche systématique des responsables départementaux du
PCE ou du PSUC impliqués dans les combats de la Résistance. Si les mesures
de sécurité appliquées pour protéger l'appareil politique se révélèrent
efficaces - aucun cadre de niveau national ne fut arrêté -, le coup de
filet du 7 septembre prit au dépourvu les militants visés. Enlevés à leur
famille, à l'instar de M. B. qui, veuf, élevait seul ses trois enfants
quand il fut conduit à la frontière allemande, souvent appréciés de leurs
employeurs qui n'hésiteront pas à témoigner en leur faveur - dans le cas de
Jaime G. les protestations viendront du maire, du député et de l'employeur
-, soutenus par leurs collègues de travail, - à Tarbes, des grèves
éclateront à l'annonce de l'interpellation des militants espagnols -,
beaucoup ne comprirent pas la sévérité de la sanction qui les frappait[68].
Tous réclamèrent un jugement en bonne et due forme que la loi, cependant,
ne prévoyait pas.
Là réside, sans doute, l'une des raisons pour lesquelles
l'événement, au total peu glorieux pour ses protagonistes, retomba dans
l'oubli. Rondement menée et, pour une large part, couronnée de succès,
l'opération ne réussira pas à affaiblir durablement l'implantation du PCE
en France. A sa manière, le coup porté aux anciens guérilleros accélérera
le tournant stratégique du parti espagnol vers la lutte politique. Le
réchauffement franco-espagnol, marqué, entre autres, par l'ouverture des
frontières à la main d'oeuvre immigrée, contribuera lui-même à relancer la
propagande communiste dans un milieu que le reste de l'exil politique eût
le tort de négliger[69]. Privée un temps de cadres précieux, l'organisation
renouera assez vite les fils rompus et remettra sur pied ses différentes
instances, épurées des anciens résistants coupés, pour cause d'assignation
à résidence, de leurs bases locales. Il n'est pas sûr que ce résultat ait
profondément attristé les sommets du PCE...
L'heure des magistrats viendra, quand les passions de la guerre
froide se seront apaisées. Il restera alors aux juges administratifs de
combler par la jurisprudence les vides du droit, avant que le législateur
ne décide à son tour, par la loi du 21 octobre 1981, d'améliorer la
protection du réfugié[70]. Pour les expulsés-assignés de 1950, ces
garanties arrivaient trop tard et nul n'aurait songé à des réparations. Qui
se souciait encore, d'ailleurs, de ces quelques dizaines d'étrangers,
déracinés et dispersés, témoins encombrants des rigueurs et des errements
d'un passé révolu?

-----------------------
[1] Archives Nationales (A.N.) F7 16114, récapitulatif opération Boléro-
Paprika.
[2] "Boléro" est le nom de code désignant l'action menée contre les
Espagnols. "Paprika" concerne les autres étrangers, pour la plupart
ressortissants des démocraties populaires. Nous nous attacherons ici à la
première. Le succès de l'opération, notons-le, ne fut pas complet: cent
seize réfugiés, alertés, manquèrent à l'appel.
[3] A.N.F7 16114 et Archives départementales de la Haute Garonne (A.D.H.G.)
20042/291. En décembre 1951, le préfet de la Haute Garonne annoncera 198
notifications pour un total de 224 arrêtés d'expulsions et proposera
d'ajouter 50 nouveaux noms.
[4] Ses locaux étaient situés rue de Varsovie à Toulouse.
[5] Mundo Obrero est l'organe du PCE, Lluita, celui du PSUC et Nuestra
Bandera, leur revue théorique.
[6] Le Parti Socialiste Unifié de Catalogne (PSUC) fut créé en 1936 à la
suite de la fusion de plusieurs organisations socialistes et du Parti
communiste catalan. Cette origine lui valut un statut à part au sein du
Komintern qui accepta son affiliation, distincte de celle du PCE.
[7] L'Humanité du 02/9 et du 08/9/1950 et David Wingeate Pike: Jours de
gloire, jours de honte. Le PCE en France depuis son arrivée en 1939 jusqu'à
son départ en 1950, Paris, SEDES, 1984, p. 233.
[8] L'Humanité du 08/9/1950. La Dépêche du Midi, du même jour, fait état
de camions de CRS sillonnant la ville de Toulouse.
[9] Archives Marty, CRHMSS, dossier R. Témoignage écrit de Burgaleta en
date du 22/9/1950. Celui-ci fut expulsé vers la RDA sans l'accord préalable
des autorités de ce pays. Ces premiers expulsés, regardés comme de
possibles espions à la solde des puissances occidentales, seront très mal
reçus par leurs hôtes involontaires. Entretien avec Luis Fernandez du
21/3/1995.
[10] A.N.F7 16114.
[11] A.N.F7 16114. Le dossier de presse mentionne les articles de l'avocat
Pierre Brandon " Je reviens des camps de la mort lente" et d'André
Wurmser, "Sommes-nous 5 ans après la victoire ou 10 mois avant la défaite?
". Ce Soir des 27/11 et 01/12/1950.
[12] A.N.F7 16114 Lettre du ministre de l'Intérieur au président de la
Ligue des Droits de l'Homme, le 7 février 1951.
[13] Toute la presse en convient. Les communistes ne sont pas les derniers
à le souligner. Un communiqué du C.C. du PCE, reproduit par l'Humanité du
7/10/1950 constate: "(...) Après tant de bruit, "les plans d'opération",
"documents secrets"... que l'on affirmait posséder, n'ont pas été produits.
Aucun détenu n'a été l'objet d'une accusation précise(...)". En page
intérieure, la Dépêche du Midi du 8/9/1950 confirme l'absence de preuves:
"toutes les opérations se sont passées selon le plan prévu. On n'a pas
découvert d'armes mais quelques documents sans intérêt". Le lendemain, le
quotidien suppose toutefois que "les suspects avaient depuis longtemps pris
la précaution de faire disparaître tous les dossiers compromettants."
[14] Préfet de la Haute Garonne de 1948 à 1958, il sera nommé à la tête de
la préfecture de la Seine avant de devenir ministre de l'Intérieur en 1959.
[15] A.D.H.G 2042/291 Conférence du 3 mars 1948.
[16] G. Noiriel, La tyrannie du national: le droit d'asile en Europe (1793-
1993), Paris, Calmann-Levy, 1991, pp.140, 141, 195 et 200.
[17] Pour en savoir plus sur les positions de G. Mauco, on se reportera à
la mise au point de P. Weil: Racisme et discrimination dans la politique
française de l'immigration, 1938-1945 / 1974-1995 in Vingtième Siècle, n°
47, juillet-septembre 1995, pp. 77 à 102.
[18] Sur les quinze hauts fonctionnaires qui participent à cette
conférence, treize étaient déjà en poste sous la IIIème République et ont
servi le régime de Vichy plusieurs années durant. Six ont cependant connu
une interruption de carrière en 1943 ou 1944 pour leurs activités de
résistance. Pour deux d'entre eux, cet engagement entraîna leur déportation
en Allemagne. Malgré ce passé de résistant, aucun d'eux ne manifeste une
quelconque solidarité envers des hommes qui, six ans auparavant, étaient
leurs frères de combat. Tout au plus se désolidarisent-ils des propositions
les plus extrêmes préconisant l'ouverture de camps permanents pour
"indésirables".
[19] D'après G. Mauco, "la francisation est d'autant plus difficile,
malgré les apparences, pour les éléments déjà évolués, chez lesquels la
formation antérieure s'oppose à une francisation en profondeur", in P.
Weil, article cité, p. 86.
[20] A.D.H.G. 2042/291. Rapport du préfet de la Haute Garonne, en date du 3
mars 1948.
[21] A.D.H.G. 2358/111. Rapport du commissaire central du 19/11/1947. Ce
dernier accuse un inspecteur du B.S.T. d'avoir prévenu l'un des
responsables anarchistes d'une perquisition à leur siège, 4 rue de Belfort,
à Toulouse. L'inspecteur aurait fait pression sur le fonctionnaire de
police en exercice pour qu'il restitue les armes découvertes dans ce local.
Il le met aussi en garde contre toute poursuite du dénommé M. impliqué dans
cette affaire et , par ailleurs, un de ses agents. Les autorités
espagnoles, à travers la presse phalangiste, se plaignent également de
l'attitude d'un officier du SDECE, à Toulouse, qui a soustrait à la police
française un membre du POUM se livrant à une active contrebande
frontalière, A.N. F7 16114.
[22] Sensible au point de vue des diplomates en poste en Espagne, le
ministère des Affaires Etrangères n'est pas le dernier à prêcher la fermeté
à l'encontre des organisations de républicains espagnols.
[23] A.D.H.G. 2358/111, note du 06/11/1947.
[24] Le M.L.E.-C.N.T. ( Mouvement Libertaire Espagnol-Confédération
Générale du Travail ) est le groupe anarchiste le plus influent en France
et le seul reconnu par la Ière Internationale, ce qui lui assure des appuis
dans les autres pays européens.
[25] A.D.H.G. 2358/111. Rapport de police du 20/04/1950.
[26] Avancée par les enquêteurs, la thèse de l'appartenance de la victime à
la branche comorériste du PSUC n'est pas confirmée par les témoins qui
connaissaient personnellement la victime et sa famille. Entretiens avec G.
Formenti (25/04/1994) et avec J. Fabregat (27/12/93).
[27] A.D.H.G 2358/111. La presse franquiste confirmera la mort du mari,
abattu par la Garde Civile espagnole, alors qu'il s'apprêtait avec d'autres
compagnons à franchir la frontière, cf. La Vanguardia du 29/04/1950.
[28] Cf La Dépêche du Midi du 4/9/1950 et surtout du 6/9/1950. Dans ce
dernier numéro, l'auteur de l'article fait un curieux rapprochement entre
la découverte du dépôt d'armes de Barbazan, la nécessité pour le PCE de
punir les délateurs et le meurtre de R. M.., attribuant à la victime
l'intention de livrer des informations à la police au sujet d'une
agression contre un inspecteur de police survenue le 5 avril. Aucun rapport
de police, précisons-le, ne conforte cette version. Le rédacteur très
imaginatif, ajoute que le mari de R. M., n'aurait pas été tué par les
carabiniers mais par ses propres amis. Blessé mortellement, il aurait
livré, sur son lit d'hôpital, de nombreuses informations à la police
franquiste, mettant à jour un réseau d'espionnage soviétique en Espagne.
L'article conclut à l'arrestation imminente de ses membres. Pour Pike, op.
cité, p.229, l'affaire du lac de Gironis serait en rapport avec le
châtiment des responsables de la découverte du dépôt de Barbazan. Mais,
l'historien ne fournit pas ses sources.
[29].A.D.H.G. 2042/291. Rapport du préfet de la Haute Garonne au ministre
de l'Intérieur du 12/10/1950.
[30] Selon le Monde du 07/09/1950: "L'affaire de la malle sanglante du lac
de Gironis aurait amené la découverte d'un réseau d'espionnage soviétique
sur l'Espagne. L'enquête se poursuit et il est probable que l'on procédera
bientôt à des arrestations".
[31] A.D.H.G. 2042/291. Rapport du préfet de la Haute Garonne au ministre
de l'Intérieur du 8/9/1950.
[32] A.D.H.G. 2358/111 Rapports des 20/10/1947, du 4/11/1947 et du
19/11/1947. Il est à remarquer que les enquêteurs eurent du mal, dans les
premiers temps, à distinguer les anarchistes des communistes. De fait, les
premiers dépôts mis à jour appartenaient plus souvent aux premiers qu'aux
seconds.
[33] A.D.H.G. 2042/292.
[34] Des témoins désireux de garder l'anonymat ont confirmé qu'avant la
démobilisation, des armes avaient été subtilisées et cachées en prévision
d'un coup de main en Espagne. Force est de constater qu'après la découverte
du dépôt de Barbazan, les autorités ne mentionnent jamais la présence
d'équipements de fabrication récente. A.N.. 890576 art. 3, Le rapport fait
état d'une prise de 7 tonnes de matériel trouvées au domicile d'anciens
guérilleros membres de l'entreprise Valledor, mais précise qu'il s'agit
d'armes non rendues à la Libération et correctement entretenues depuis
cette date.
[35] A.D.H.G. 2042/292. Un rapport du commissaire divisionnaire au préfet,
daté du 17 août 1950 constate l'absence, sur le site de l'ancien chantier
forestier de Gincla ( Aude ), d'armes et de munitions. Le commissaire en
déduit qu'elles ont été transportées ailleurs. Malgré les perquisitions
intervenues au moment de l'opération "Boléro", aucune nouvelle cache ne
sera mise à jour.
[36] Entretiens avec le général Luis Fernandez des 8 et 15/3/1995. Seul
général guérillero avec Blasquez, dit César,il est l'un des protagonistes
majeurs de la période en tant que président de l'Amicale des guérilleros,
fondateur de l'entreprise Fernandez-Valledor et membre du C.C. du PCE.
Objet d'une sollicitude particulière de la part des autorités, il fut
assigné à résidence dés 1948. En 1950, il échappa à la rafle en s'enfuyant
en Pologne. Découvrant le contenu de certains rapports de police, Luis
Fernandez relèvera un certain nombre d'erreurs sur les personnes - par
exemple, le dirigeant des jeunesses communistes, Claudin, est constamment
confondu avec son oncle, militaire de carrière, qui n'a jamais appartenu à
l'organisation communiste ou à son état-major militaire -, et la
composition de la direction militaire à laquelle ne participèrent jamais ni
le général César, ni M. Angel Sanz.
[37] Soit Agrupacion Militar del Ejercito Republicano de Espana.
[38] Plus couramment appelée Amicale des anciens guérilleros.
[39] Témoignage de Luis Fernandez, alors principal négociateur avec les
pouvoirs publics. Entretien du 15/3/1995.
[40] Un ouvrage publié en 1946 leur rend hommage: "...Si au cours de cet
hiver, les Toulousains peuvent se chauffer un peu mieux, si les villes de
l'Aude, de l'Hérault, de Lyon même, ont vu leur contingent de bois
augmenter; si les transports routiers régionaux à carburant forestier ont
pu fonctionner mieux; si la cadence des wagons chargés est en augmentation,
tout cela est dû un peu aux guérilleros qu'une initiative intelligente a pu
mettre au travail dans des conditions convenables et humaines...". A la
recherche d'une patrie. La France devant l'immigration, Paris, Ed. Réalité,
1946, p. 194.
[41] A.N. F7 15589, F7 16114, CAC 890576 art.3. et entretien avec Luis
Fernandez.
[42] Un centre spécial de soins associé à cette coopérative, fonctionne à
Meillan grâce aux fonds fournis par l'Unitarian Service, organisation
humanitaire nord-américaine.
[43] A.N. F7 15589. Synthèse du préfet de la Haute Garonne au ministre de
l'Intérieur datée de janvier 1950.
[44] Le fils du Dr Giral, médecin lui-même, aurait tenté de le mettre à la
disposition du gouvernement républicain mais se serait heurté au refus poli
du général Fernandez ( Entretien du 15/03/95 ). Au même moment, le
responsable de la Croix-Rouge espagnole, à la tête d'un dispensaire et chef
de file d'un petit parti républicain, intervenait auprès de l'Unitarian
Service afin de le mettre en garde contre les dirigeants de l'hôpital.
Certains membres du conseil de l'Ordre de Toulouse feront valoir, en outre,
que le personnel médical de Varsovie, titulaire de diplômes étrangers, se
rendait coupable d'exercice illégal de la médecine ( A.N. F7 16114, rapport
du préfet au ministre ).
[45] Entretien avec J. Fabregat.
[46] A.N. F7 16114. Rapport du préfet de la Haute Garonne au ministre de
l'Intérieur. Pour sa part le PCE ne fait pas mystère des facilités qu'offre
l'établissement. En témoigne une photo parue dans Mundo Obrero, peu après
l'enterrement d'un dirigeant rentré clandestinement d'Espagne et mort à
l'hôpital.
[47] A.N. 890576 art.3. Une synthèse du PCE, datée de janvier 1950, estime
à un millier, environ, le nombre de communistes espagnols en Haute Garonne
et à 3 000 celui des adhérents des groupements satellites. "La colonie
espagnole du département comptant 30 000 individus environ, on peut estimer
à 2,5% les éléments éprouvés du PCE et à 10% les apparentés", poursuit
l'auteur du rapport. "Il semble après constatation", extrapole-t-il, "que
l'on puisse adopter les mêmes pourcentages sur le plan national par rapport
à la colonie espagnole existante ( environ 300 000 )." En dehors des
Pyrénées-Orientales, nous n'avons pas trouvé d'autres documents
susceptibles de valider ces chiffres.
[48] Cf. F. Aguado Sanchez: El maquis en Espana, Madrid, Editorial San
Martin, 1975, T. 1, 717 pp. L'ouvrage, écrit par un ancien officier de la
garde civile, confirme cette évolution perceptible dès 1949, pp. 297 et
395. Cf. encore les mémoires de G. Lopez Raimundo, Primera clandestinidad,
Barcelone, Ed. Antartida/Empurias, 1993, pp. 177 à 201.. L'auteur,
dirigeant du PSUC, reviendra clandestinement en 1947 à Barcelone et
reconstituera l'organisation sur de nouvelles bases.
[49] Mundo Obrero du 17/8/1950.
[50] A supposer que les militants du PCE se soient adressés exclusivement à
leurs compatriotes , près de deux réfugiés sur trois auraient signé
l'appel...
[51] Cité dans R. Pelletier, Traversée d'une époque, Toulouse, 1974,
Chez l'auteur , p. 149.
[52] Muettes sur leurs sources ou preuves, toutes les synthèses des R.G.
concluent sur la fonction subversive du PCE. Ainsi en va-t-il de l'un des
rapports les plus complets daté de janvier 1950 (A.N. C.A.C. 890 576
art.3): "l'organisation militaire du PCE (il faut entendre le bloc PCF,
PCE, FTP et guérillero), y lit-on, se caractérise par l'existence de deux
dispositifs qui se complètent l'un l'autre, à savoir: le dispositif
militaire d'alerte prêt à fonctionner immédiatement, dès le déclenchement
d'une grève générale et le dispositif militaire général dont la mise en
place, par l'Etat-Major militaire nécessiterait quelques jours (...). Les
consignes du PCF sont formelles sur ce point ces groupes devraient tenir
durant 4 jours la zone frontalière et faire échec aux forces de maintien de
l'ordre de la région. Le PCF estimerait à 12 jours le délai nécessaire à
l'Armée Rouge pour arriver aux Pyrénées". L'auteur note toutefois que "si
les groupes espagnols peuvent être d'une grande efficacité sur notre
territoire, ils seraient par contre rapidement décimés s'ils s'avisaient de
vouloir s'aventurer sur le territoire espagnol en face d'une armée
organisée et en position de combat". On comprend mal comment l'armée
française, rodée pourtant par le conflit indochinois obtiendrait de moins
bons résultats que son homologue espagnole. L'existence d'une guérilla
communiste, à bout de souffle, mais bien réelle en Espagne est ici, en
revanche, totalement passée sous silence.
[53] Le 1er août 1950, le Sénat américain autorise l'octroi d'un prêt de
62,5 millions de dollars à l'Espagne. Le 4 novembre 1950, l'O.N.U. revient
sur sa résolution du 12 décembre 1946 et autorise ses membres à rétablir
des relations diplomatiques avec ce pays.
[54] R. Pelletier, op. cité, p. 148 et 149 et G. Dreyfus-Armand:
L'émigration politique espagnole en France au travers de sa presse. Thèse,
IEP, Paris, 1994, vol.1, pp.164 et 166.
[55] A.N. F7 16114. Réponse de Queuille du 7/2/1951 au président de la
Ligue des Droits de l'Homme. Au reproche qu'on lui fait d'avoir violé
l'esprit de l'ordonnance du 2 novembre, le ministre répond: " cette
critique revient, en somme, à contester l'urgence particulière des
décisions d'expulsion (...). Je n'insisterai pas sur le fait que,
responsable de l'ordre public en France devant le Parlement et devant le
pays, je suis seul juge du caractère d'urgence que peut présenter telle ou
telle mesure".
[56] Cette commission spéciale qui siège auprès du préfet est composée de
trois membres: le président du tribunal civil du chef-lieu du département,
le chef du service des étrangers à la préfecture et un conseiller de
préfecture.
[57] cf. D. Turpin, Les nouvelles conditions d'expulsion des réfugiés in
Revue française de droit administratif, mars-avril 1986, pp. 143 et 145.
[58] A.D.H.G. 2042/291, conférence des préfets du 3 mars 1948.
[59] L'ordonnance du 2 novembre 1945 offrait la qualité de résident
privilégié à tout étranger âgé de moins de 35 ans lors de son arrivée en
France et y résidant depuis trois années consécutives. Ce statut permettant
de séjourner sans restrictions sur l'ensemble du territoire, était
exceptionnellement accordé, sans conditions d'âge, par décret ministériel
et après enquête, à tout étranger ayant rendu des services importants à la
nation, en particulier au côté des Alliés lors de la Seconde Guerre
mondiale. Les communistes espagnols, massivement engagés dans la
Résistance, en furent les principaux bénéficiaires. Aussi la décision
ultérieure de les éloigner de la frontière pyrénéenne ne manqua pas de
poser quelques problèmes. Là où un simple arrêté préfectoral d'assignation
à résidence aurait suffi, il fallut passer par la procédure moins discrète
de l'arrêté d'expulsion ministériel transformé en assignation à résidence.
[60] A.D.H.G. 2692/142, la circulaire de J. Moch aux préfets du 26/3/1948
précise: "lorsqu'un réfugié dont l'attitude justifie l'éloignement des
départements interdits, appartient à la catégorie de résidents privilégiés,
il convient de se saisir à son égard de proposition d'expulsion, sans
consulter au préalable la commission départementale des expulsions, s'il
est établi qu'il se livre à une activité politique incompatible avec la
stricte neutralité qui s'impose en cette matière à tout étranger".
[61] A.N.F7 16114. Aux protestations des personnalités mentionnées, il faut
ajouter celles des députés communistes et socialistes, sans compter les
pétitions venues d'Amérique latine.
[62] Idem. Une première liste précise la situation familiale des expulsés
de l'Aude. Sur un total de 33 expulsés, 26 sont mariés et 23 ont des
enfants. Le second inventaire, établi par nos soins, à partir des procès-
verbaux individuels dressés en Algérie concerne les seuls Catalans ( 23 sur
81 soit 28 % de l'effectif ).
[63] A.N. F7 16114. Rapports des assistantes sociales sur leur mission en
Corse (le 20/12/1950) et en Algérie (le 06/3/1951). Un rapport du préfet du
Tarn, en date du 25 octobre 1950 avait déjà signalé la situation très
difficile de certaines familles dont le sort devait émouvoir l'Archevêque
d'Albi.
[64] Idem, lettres des 20/12/1950 et du 8/2/1951 du ministre des Affaires
Etrangères à son collègue de l'Intérieur. Après que plus de la moitié aient
désormais opté pour les pays de l'Est, le ministre s'émeut: "assignés à
résidence en Corse et en Algérie, les intéressés sont par là-même dans une
très large mesure inoffensifs. Refoulés au delà du rideau de fer, ils y
seront en revanche repris en main par les centres d'agitation communiste et
il y a lieu de penser qu'ils réapparaîtront tôt ou tard comme agents
clandestins. Les dirigeants de Madrid nous tiendraient vraisemblablement
pour responsables d'une telle situation."
[65] A.D.H.G. 2042 291, en septembre 1952, les préfets du midi dressent de
nouvelles listes d'expulsables. La plus courte compte 51 noms contre 116 à
la plus longue.
[66] A.D.H.G. 2042 278. Rapport de la DST au préfet de la Haute Garonne du
18/2/1956, au préfet de l'Ariège du 5/12/1955 et au préfet du Gers du
20/10/1955.
[67] Entretiens avec MM. Pamies (20/6/1994), Monge (5/7/1994) et Fernandez.
[68] Entretien avec Luis Fernandez. " Nous étions des révolutionnaires, pas
des conspirateurs." L'explication du général Fernandez résume assez bien
l'état d'esprit des militants. La lecture des procès-verbaux établis par
les R.G. après interrogatoire des assignés conforte cette impression, A.N.
F7 16114.
[69] A.N. 890 576 art.4. Un rapport de synthèse des renseignements généraux
de 1964 relie la croissance des effectifs du PCE à l'afflux massif
d'immigrés économiques. Il constate que les autres partis de l'exil ont été
incapables d'intéresser la masse des nouveaux immigrants tout en se
félicitant que les missions catholiques taillent quelques croupières à
l'organisation communiste. L'implantation communiste parmi les immigrés est
confirmée par M. Monge qui se souvient d'avoir milité très activement parmi
les saisonniers des rizières de Camargue et les vendangeurs du Midi.
[70] Cf. art. cité in Revue française de droit administratif, p.143 et le
commentaire de S. Hubac et J. E. Schoettl in Actualité juridique et droit
administratif, n° 5 mai 1985, pp. 261 et 262.
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